12 juin 1990
Document de travail
La dernière fois le – il n’y a pas de rapport sexuel – nous a arrêté. Je mettais l’accent sur le fait que s’il y avait conjonction des sexes il n’y avait pas de rapport sexuel. Ce mot même de rapport a arrêté certains d’entre vous. Je n’ai pas voulu répondre que c’était dans un sens mathématique qu’il fallait entendre ce mot rapport, mais je me suis dit qu’il fallait dans notre travail de cette année parler de ce – il n’y a pas de rapport sexuel -. Pour ce qui est la convergence, la conjonction des sexes. Lacan dans un de ses séminaires, je crois, le dernier de RSI celui du 13 mai 1975 appelle ça le frotti-frotta. C’est beaucoup plus simple à comprendre. Lorsqu’il parle de – il n’y a pas de rapport sexuel – ce n’est pas de frotti-frotta dont il est question. Je me suis dit que ça ne nous éloignerait pas du tout de notre thème de cette année, le symptôme, bien au contraire, c’est une façon de nous y ramener en partant de ces notions élémentaires qui nous ont servi tout au long de l’année.
J’ai remis au tableau ce graphe, le graphe du bébé infans, de celui qui ne parle pas encore et j’ai mis ce terme que Lacan a employé, je crois, une seule année, l’année du désir et son interprétation. J’ai mis que son cri est assignifiant. Il ne s’agit donc pas encore de parole, nous dit Lacan. Ce cri assignifiant rencontre l’Autre. Et l’Autre donnera une réponse. Mais lorsque l’enfant reçoit le langage et qu’il s’y engouffre, alors le sujet, le sujet de l’inconscient va émerger des signifiants qui le recouvrent au sein de l’Autre, du grand Autre réel. Et ce sont ces signifiants qui le recouvrent qui vont former l’inconscient. Ça va être toute cette articulation, cette batterie de ces signifiants qui forment le corps symbolique du grand Autre, qui vont former l’inconscient. Et donc cet inconscient est cette articulation de signifiants S1-S2.
Alors, pour bien comprendre ce qui va nous intéresser ce soir, reprenons : lorsque l’enfant commence à parler, lorsque son cri devient parole, il s’adresse donc au grand Autre, il s’adresse au grand Autre pour la satisfaction de ses besoins. Ici Lacan parle de pur sujet du besoin. Mais le fait de s’adresser à l’Autre, et parce qu’il y a ces signifiants au cœur de l’Autre, que lui-même se sert du signifiant, ce qui va en résulter, c’est que certes il y aura une satisfaction des besoins, mais ces besoins vont à partir de ce moment là avoir la marque de ces signifiants qui se trouvent au cœur de l’Autre. Donc (il) s’adresse à l’Autre, (il y a) satisfaction des besoins, mais les besoins à partir de ce moment là auront une marque, une marque de ce passage. Et ce qui va en résulter c’est le sujet, le sujet barré, barré parce que un signifiant a été décomplété au cœur de l’Autre.
Donc ce sujet est sujet effet de signifiant. On peut dire qu’il vient de subir la passion du signifiant, il va pâtir du signifiant.
Donc sujet pur du besoin, appel à l’Autre, émergence du sujet barré, ce sujet barré qui a une satisfaction de ses besoins, va à nouveau s’adresser à l’Autre, pour à nouveau avoir satisfaction de ses besoins. Mais ces différents appels à l’Autre vont faire que tout ce qui est ces S1 s’articulent forment cette batterie,(Solange Faladé écrit au tableau : S1/$ (S1(S1—>S2))) donc toute cette batterie se met là en place. Les autres appels du sujet à l’Autre, appels pour avoir satisfaction du besoin, quelque chose va se passer, et ce quelque chose a une importance telle que Lacan s’y est arrêté pendant une bonne partie de son année sur les formations de l’inconscient.
Le désir se met en place (1) parce qu’il y a eu satisfaction des besoins. Mais ce désir qui se met en place, nous dit Lacan, se met en place au-delà de la demande. C’est la satisfaction des besoins qui fait qu’à nouveau on s’adresse à l’Autre, c’est la Befriedigung dont nous parle Freud dans la pulsion. Mais quelque chose d’autre se passe c’est que la demande n’est plus simple demande de satisfaction des besoins, mais aussi demande pour qu’il y ai présence de l’Autre. Et cette demande qui s’adresse à l’Autre pour sa présence, fait que en deçà de la demande quelque chose se creuse qui est aussi de l’ordre du désir, c’est ce désir que Lacan nous dit être en deçà de la demande, et ceci a avoir avec la demande d’amour.
Donc, parce qu’il est sujet parlant, parce qu’il va pâtir du signifiant, le signifiant va faire que la demande à la fois satisfera le besoin, mais aussi fera que l’Autre sera demandé, appelé rien que pour sa présence, et Lacan ajoute, parfois pour son absence. Souvenez-vous de l’exemple qu’il avait pris. C’était le petit Hans. Pour le petit Hans, d’avoir tout le temps la mère sur le dos, était à l’origine de son angoisse. Donc, demande faite à l’Autre pour sa présence, mais qui peut être aussi demande faite à l’Autre pour son absence.
La demande c’est quoi ? C’est du signifiant puisque le cri qui est devenu parole, porte avec lui, le signifiant, ce signifiant qui est adressé à l’Autre. La demande est donc, c’est un signifiant. Et avec cette demande quelque chose se met en place qui est le désir, et ce désir, c’est le signifié. Vous savez que Lacan pour rendre compte de la découverte freudienne, et en particulier de tout ce que Freud autour de l’inconscient a apporté, que ce soit ce qui est consigné dans psychopathologie de la vie quotidienne, ce qui se trouve dans le mot d’esprit, Lacan s’est rendu compte que pour pouvoir faire saisir ce qu’est cette découverte de Freud, il lui fallait ne pas accepter ce qui était le schéma de Saussure. Pour Saussure il y avait un signifié, et sous ce signifié le signifiant. Lacan met l’accent sur ceci, que c’est le signifiant qui est l’agent, qui est l’action, et que ce signifiant va faire en sorte que sous sa chaine courent un certain nombre de signifiés. Ce qui fait que lui, Lacan, renverse le schéma de Saussure et met grand S le signifiant et au dessous de la barre le signifié. Et bien c’est ça : la demande c’est le signifiant, c’est ce qui se trouve à ce niveau, et le désir c’est le signifié, c’est ce qui est là. C’est tout à fait important ce changement que Lacan a opéré pour rendre compte de ce qu’est l’inconscient de Freud c’est à dire de l’action du signifiant. C’est l’agent essentiel et c’est à partir de cet agent essentiel que il va s’efforcer de nous faire saisir ce qui est l’inconscient.
L’inconscient c’est cette batterie de signifiants mais l’inconscient c’est aussi une réalité sexuelle. Alors comment saisir ce qu’est l’inconscient à partir de cette batterie (de) signifiants qui en fait le corps ?
Pour cela Lacan part de la demande, de cette demande qui crée le désir, et qui fait que, sans que rien du sexuel se soit mis en place, il y a déjà le désir. C’est un point tout à fait important. C’est ce que Lacan a appelé - le champ clos du désir -. Et toute la question est de savoir comment dans ce champ clos du désir qui s’est mis en place uniquement à partir de la parole, uniquement à partir du signifiant, comment le sexuel va pouvoir s’y inscrire ?
Alors nous allons reprendre ce qui se passe lors de la mise en place du sujet. Qu’est-ce qui se passe, nous dit Lacan ? Il y a ce premier appel, ces différents appels qui font que le sujet émerge, ces différents appels qui font que il y a cette batterie de S1, mais il y a ce qu’il a appelé le deuxième appel, le distinguant des autres appels qui ont mis en place les S1ce deuxième appel qui fait que le S2 peut s’inscrire. Mais vous vous souvenez que lorsqu’il y a ce deuxième appel, le sujet, à partir de maintenant c’est le sujet, va rencontrer le désir de la mère, et rencontrant le désir de la mère aura à faire avec l’objet de ce désir. Et l’objet de ce désir c’est le phallus imaginaire, c’est ce qui manque à la mère. Et donc (dans) ce deuxième appel, cet appel qui va faire que le S2 va s’inscrire, il y aura le Nom du Père, l’enfant rencontre cet objet, l’objet du désir de la mère, rencontre ce moins phi.
Donc, dans le champ clos du désir, du fait de l’appel qui fera que le deuxième signifiant, le S2 puisse s’inscrire, il y aura rencontre avec le désir de la mère, et rencontrant le désir de la mère, l’enfant rencontre l’objet de ce désir qui est le moins phi.
Mais en fait pour pouvoir symboliser ce moins phi, pour pouvoir identifier l’objet du désir de la mère, il faut que le S2 puisse s’inscrire, c’est à dire qu’il y ai le Nom du Père qui se trouve sur cette chaine signifiante, et ce Nom du Père, c’est le grand Phi puisque nous dit Lacan, il y a métaphore paternelle, il va y avoir substitution d’un signifiant qu’il a appelé dans un premier temps désir de la mère, mais qui en fait plus tard, il en fera quelque chose d’un signifié, mais pour que ça puisse être signifié, il fut qu’il y ai un signifiant qui soit là, et ce signifiant c’est ce grand Phi, c’est le phallus.
Si bien que du simple fait de la demande, du simple fait de cette circulation, des signifiants, se met en place le désir qui est au cœur de l’inconscient. Et dans ce champ clos du désir va se mettre, s’introduire, s’inscrire le sexuel sous cette forme de ce qui manque à la mère et de ce qui fait que ce qui manque à la mère puisse être symbolisé. C’est à dire qu’il y aura là le phallus et il faut bien dire que à partir de ce moment où Lacan a pu écrire l’œdipe Freudien, métaphore paternelle, il met l’accent sur ceci, c’est que c’est en fait le phallus qui est si je puis dire le signifiant par excellence, le signifiant qui est en fait l’agent qui permet qu’il y ait ces signifiés et ce signifié particulier qui est le désir de la mère.
Donc, du seul fait du signifiant, du seul fait de la fonction de la parole dans le champ du langage, se met en place l’inconscient, cet inconscient qui sera structuré comme le langage, et au cœur de cet inconscient nait le désir, désir inconscient. Je crois que c’est là ce qui est important dans ce que Lacan nous a apporté à partir du moment où il s’est efforcé de montrer que dans la découverte de Freud il y avait ce signifiant et à partir de la technique du signifiant, comme il l’a dit lorsqu’il mettait en place le premier graphe, il a pu montrer que le désir inconscient, celui qui nous intéresse en fait, nait du seul fait du signifiant.
Le problème est le suivant : Nous avons certes cet inconscient qui s’est mis en place avec ces signifiants qui forment l’articulation signifiante qui forme l’inconscient, le problème est de saisir ce qui fait la réalité de l’inconscient. La réalité de l’inconscient, nous dit Lacan après Freud, c’est la réalité sexuelle. Alors comment cette réalité sexuelle peut se comprendre ? Qu’est-ce qui fait, qui permet qu’au niveau de cet inconscient, de cet inconscient qui a une structure de béance, — c’est ce que Lacan s’est efforcé de montrer à partir des premières découvertes de Freud : psychopathologie de la vie quotidienne, que ce soit les actes manqués, l’oublie, le lapsus, bref, ces moments où le sujet de l’inconscient apparaît, pour disparaître ensuite, ce qui vient marquer la structure de béance de l’inconscient – qu’est-ce qui peut répondre comme réalité sexuelle, pour cette structure de l’inconscient, structure de béance ? Qu’est-ce qui peut en répondre, nous dit Lacan ?
Reprenons le principe qui règle l’activité psychique : principe de plaisir principe de réalité. Reprenons ce qu’est cette homéostase, ce qui va permettre, ce qui va correspondre à ce désir inconscient et qui en même temps répond à ce système homéostatique : c’est la pulsion. La pulsion partielle, la pulsion sexuelle, c’est ça qui est la réalité sexuelle, qui est la réalité de l’inconscient. Lacan l’explique bien dans les 4 concepts : c’est ce montage de la pulsion qui est la réalité sexuelle, qui est ce qui répond à la réalité de l’inconscient. La réalité de l’inconscient c’est une réalité sexuelle et c’est là nous dit Lacan une vérité insoutenable. Nous allons voir pourquoi.
Mais auparavant je vais simplement rappeler ce que à propos de cette réalité sexuelle Lacan nous fait remarquer, dans cette première observation qui se trouve dans les études sur l’hystérie, l’observation d’Anna O. C’est une belle observation. C’est cette jeune personne suivie par Breuer, et c’est cette jeune personne qui lorsque Breuer venait la soigner, passait son temps à lui raconter des histoires, des fantaisies, des choses tout à fait bien, fait remarquer Lacan. Je ne vais pas rentrer dans le détail de l’observation. Ce qui est sûr, c’est que dans tout ce qui se disait, il n’y avait rien d’offusquant. Il y avait des choses parfois drôles mais rien qui ne pouvait choquer l’oreille et pourtant nous dit Lacan, lorsqu’il se mettait en place, il y avait là, cette réalité sexuelle qui était en acte. C’est à ce propos qu’il dit que le transfert est la mise en acte de la réalité de l’inconscient, réalité qui est réalité sexuelle. Et comment peut -on mettre le doigt sur ce qui était là, réalité sexuelle, relation sexuelle entre Anna O. et Breuer ? Lacan dit que c’est du coté de la femme, c’est du coté de la femme de Breuer que les choses viennent. Elle lui dit, elle dit à son mari – tu t’intéresses beaucoup à elle -. Et à partir de ce moment les choses vont se mette en branle si je puis dire : elle Anna O. présente une grossesse que l’on dit nerveuse, lui Breuer ne se sent plus pouvoir faire face à cette situation. Il la confie à Freud et lui dit qu’il a besoin de repos. Il va se reposer, certes, mais il fait un enfant à sa femme. Et Lacan souligne que ce qui était là en jeu, c’était bien ce désir d’enfant que bel et bien Breuer avait – au passage il fait remarquer que le désir de l’homme c’est le désir de l’Autre — donc désir d’enfant que Breuer avait et que en fait dans ce qui s’est mis en place, dans ce qui s’est joué, dans ce transfert, c’est ce qui a été mis en acte c’est bien la réalité de l’inconscient, et cette réalité est sexuelle, et que cette relation qu’il y a eut entre Anna O. et Breuer cette relation doit être appelée relation sexuelle. Et (c’est) donc à partir de ceci, que Freud a très bien pointé, qu’il a su analyser à Breuer, le désangoissant mais ne le déculpabilisant pas, nous dit Lacan, c’est à partir de là que cette réalité de l’inconscient, Freud va pouvoir insister pour dire que c’est en fait toujours sexuel. Et ce qui répond à ce sexuel c’est la pulsion.
C’est quoi la pulsion ? Souvenez-vous, lorsque nous avons commencé à en faire l’étude, c’est par l’autoérotisme de Freud, dans les trois essaies sur la théorie de la sexualité que nous avons introduit notre travail sur la pulsion. Nous l’avons introduit par la pulsion orale, à partir de ce que Freud nous dit de cette excitation produite par le lait chaud dans la bouche de l’enfant et tout ce qui en sera contaminé. Tout ce qui en sera contaminé, pourquoi ? Parce qu’il y a eu Befriedigung, il y a eu cette satisfaction, ce plaisir – traduire Befriedigung par plaisir ce n’est pas vraiment la bonne traduction mais on ne peut pas non plus dire jouissance, disons Befriedigung puisque nous ne trouvons pas un mot qui vaille pour sa traduction - donc il y a eu cette Befriedigung qui fait que à nouveau l’enfant demande à retrouver cette même satisfaction. C’est la mise en place de la Wiederholung, de la répétition nous dit Freud. Et vous savez que dans ce qu’il nous décrit c’est en fait ce que Lacan reprend autour de la demande. Il y a satisfaction du besoin, il y a eu à nouveau appel pour avoir une nouvelle satisfaction, mais puisque l’Autre ne peut pas toujours être là, l’enfant va – un objet en vaut bien un autre, nous sommes dans la métonymie – va érogénéiser au fur et à mesure tout ce qu’il pourra toucher, tout ce qu’il pourra approcher avec sa bouche. C’est là la mise en place de cette fonction de la pulsion, de cette fonction de la pulsion qui est ce qui répond à la structure de béance de l’inconscient, parce que c’est ce qui satisfait à l’homéostase.
Ce qui est important de rappeler c’est que déjà chez Freud, autour de la pulsion, l’analyse qu’il nous a fait, est en fait une analyse grammaticale. Ce sont des signifiants qu’il met en place pour traduire ce que sont ces pulsions sexuelles, ces pulsions partielles, que ce soit la bouche, l’anus, le regard, ou la voix qui soit intéressé, c’est par une analyse grammaticale qu’il rend compte de ce qu’est la pulsion. Et Lacan, ce qu’il propose pour la pulsion c’est le rapport de cette coupure signifiante du sujet avec la demande, ce $<>D qui est sur le graphe. C’est cela la pulsion. C’est donc encore à des signifiants que nous avons à faire. Et c’est par cela que la réalité sexuelle est mise en place dans l’inconscient.
Alors, c’est là la difficulté, ce qui est de l’ordre de cette réalité insoutenable, dit Lacan, c’est que pour ce qui est de la sexualité, pour ce qui est du sexuel il n’y a rien qui puisse s’en écrire, rien qui puisse s’en écrire, nous dit Lacan, au sens mathématique. Pourquoi ? Parce que nous avons à faire à des signifiants et qu’un signifiant vaut pour un autre signifiant, qu’il n’y a là rien de..., c’est sexuel, mais rien qui permettre que l’on puisse écrire une relation telle que il y aurait entre l’homme et la femme : homme et femme, si on pouvait dire que x est l’homme, y la femme, écrire cette relation xRy qui serait la relation entre homme et femme, relation sexuelle entre homme et femme. Ceci ne peut pas s’écrire puisqu’en fait nous n’avons pas la possibilité d’écrire pour la femme cet y. Et pour l’homme et pour la femme ce n’est qu’à partir de cet x, de cet x qui se définit autour d’un signifiant, d’un signifiant particulier le phallus, signifiant certes, mais signifiant que va pouvoir s’écrire ce qu’il en est de l’homme et de la femme. Rien du sexe biologique ne peut être mis en place puisque tout se crée, si je puis dire, à partir du signifiant.
Il n’y a pas de rapport sexuel parce que – et là, je ne m’occupe que du symptôme ce soir, je ne met pas en place ce qui est du petit a et comment Lacan va le reprendre pour ce qui est du fantasme, je ne m’occupe que du symptôme – il n’y a pas de rapport sexuel inscriptible dans la structure, ajoute Lacan, dans la structure de l’inconscient, car la réalité sexuelle qui est la réalité de l’inconscient, réalité qui est en accord avec la structure de béance de l’inconscient, cette réalité c’est la pulsion Et vous avez vu que la pulsion aussi est quelque chose de signifiant. Le – il n’y a pas de rapport sexuel – et Lacan nous dit : il ne faut pas entendre là ce frotti-frotta – il n’y a pas de rapport sexuel parce que ce qui structure l’inconscient c’est le signifiant. Il n’y a rien du sexe - et pour ce qui est du savoir sur le sexe nous ne savons pas grand chose – il n’y a rien du sexe en tant que tel qui s’inscrit au niveau de l’inconscient. C’est ça la vérité insoutenable, c’est que la réalité sexuelle qui est la réalité de l’inconscient c’est la pulsion qui est d’ordre signifiant, c’est la pulsion qui vient l’écrire.
Alors vous comprenez, si on reprend ce qui s’est dit la dernière fois, ce qui s’est dit autour du symptôme, de ce symptôme qui est savoir, c’est à dire de cette batterie signifiante, ce S1-S2 qui est l’articulation signifiante du symptôme, ce savoir nous dit Lacan, il y a quelque chose qui résiste à ce savoir, c’est la vérité, et cette vérité nous venons de voir ce qu’elle est. C’est le il n’y a pas de rapport sexuel. Ce – il n’y a pas de rapport sexuel – au niveau du symptôme va se traduire comment ? (Cela) va se traduire par ce qui est la signification phallique, signification du phallus.
L’année dernière nous nous sommes arrêté assez longuement sur ce texte de Lacan la signification du phallus, c’est le phallus qui signifie, c’est le phallus qui donne signification. Le phallus, nous dit-il c’est ni le fantasme, ni l’organe, ni une image, le phallus c’est ce que nous venons de voir. C’est ce signifiant qui a cette action toute particulière, et qui fait que tout être parlant va pâtir du signifiant.
Au niveau du symptôme, et bien c’est la castration, c’est ce moins phi, c’est cette castration mais qui fait que c’est de l’impuissance qui se traduit dans le symptôme.
Prenons une observation que nous connaissons bien, que nous aurions pu prendre par ce biais de – il n’y a pas de rapport sexuel -, prenons l’observation d’Élisabeth Von R. Vous savez qu’elle vient voir Breuer, puis Freud parce qu’elle ne peut pas marcher, elle ne marche plus. Prenons le moment où elle se trouve avec son beau-frère, sa sœur est malade, elle fait une promenade avec lui. Elle se dit : - ça pourrait se traduire par un vœu, je n’ai pas eu le temps d’aller vérifier le terme allemand dont nous parle Freud, mais enfin, elle se dit que – cet homme pourrait lui convenir, pourrait être son mari. Mais qu’est-ce qui s’en suit ? Il s’en suit qu’elle n’arrive plus à marcher. C’est l’angoisse et là c’est bien l’impuissance qui vient marquer...C’est bien cette impuissance qui fera qu’un jour elle ira consulter. Et là, ça se traduit par – elle ne peut plus marcher -. Et c’est à partir de cette impuissance que le travail analytique va se mettre en place au prés de Freud. Dans un temps de ce travail, Freud espère arriver à quelque chose qui serait de l’ordre d’une harmonie. Elle pourrait elle aussi trouver un mari. Mais les choses ne marchent pas immédiatement comme cela, et en définitive ce qui se passe : Freud a su qu’elle s’était marié à l’étranger. Mais ce n’est pas ce qui nous intéresse ce soir. Dans cette observation, ce qui nous intéresse c’est ce qui a avoir avec cette impuissance, impuissance qui vient marquer le – non rapport sexuel -.
Et pour expliquer ce – non rapport sexuel – là, je vais quand même en dire un mot ce soir parce que cette observation vient l’illustrer. Lacan, lorsqu’il se sert de ses nœuds pour essayer de reprendre ce – il n’y a pas de rapport sexuel – se sert de deux anneaux, deux anneaux qui ne sont pas noués, qui vont tourner chacun dans son sens, et bien c’est ce qui arrive à Élisabeth Von R. elle tourne dans son sens, lui tourne dans son sens, et tout ceci parce que il n’y a pas de rapport sexuel. Pour elle ça se traduit par l’impuissance parce que justement quelque chose ne peut pas se nouer à ce savoir qui est cette vérité insoutenable du non rapport sexuel.
Et lorsque cette vérité peut s’accrocher au savoir, c’est ce qui se passe dans certains cas lorsque l’analyse a pu être menée à ce point de finitude qui fait que ce qui est là masqué, ce qui résiste au savoir peut être dévoilé : ce – il n’y a pas de rapport sexuel -. Mais c’est le sens de la castration qui sera alors saisit. Et vous savez que Lacan différencie la signification du sens, la signification est du coté de l’impuissance, le sens avec ce qu’il y a toujours de non-sens qui se joint au sens, - souvenez vous de ce que nous avons la dernière fois dit autour de ce choix à faire, choix qui ne peut pas se faire sans qu’il y ait toujours du non-sens et donc ce sens avec ce non-sens inévitable puisque il y a du sujet, du sujet barré, pâtissant du signifiant -, ce sens ça va être du coté de l’impossible. C’est à dire que quelque soit ce qu’on tentera de faire l’issue d’une analyse menée à son terme, à ce que Lacan a appelé ce point de finitude, sera cet impossible contre quoi on ne peut que se cogner, c’est qu’il n’y a pas de rapport sexuel. C’est que entre homme et femme rien du sexe ne peut se savoir, que la réalité sexuelle qui est celle de l’inconscient, cette réalité a pour (étai) le signifiant.
Vous voyez que ça ne nous éloigne pas de notre symptôme, que ce qui fait problème pour l’être parlant c’est bien ce fait que le sexuel c’est le signifiant qui vient l’imprégner, l’inscrire, si je puis dire, au cœur de l’inconscient. A partir de ceci on peut comprendre tout ce qui aberrations, tout ce qui est difficultés, manifestations symptomatiques quant au comportement sexuel de l’être parlant. Il ne sait pas. C’est bien ce qui vient marquer là, le sujet de l’inconscient, c’est qu’il ne sait pas. Ce – il n’y a pas de rapport sexuel- j’y reviendrai puisque il y a ce qui intéresse le fantasme - et ce qui intéresse le fantasme, Lacan, c’est autour de cet objet petit a, cet objet petit a que j’ai marqué mais je ne m’y suis pas arrêté ni ce soir ni la dernière fois – mais là aussi il y a la question de la jouissance qui est à prendre en compte. Cette question de la jouissance je n’en parlerai pas ce soir. Mais je tiens quand même tout de suite à le signaler, car pour ce qui est de l’être parlant, de ce sujet du signifiant, la question de la jouissance est à prendre en compte également. Mais cette jouissance, bien que ce soit autour du phallus qu’il y a à considérer ce qu’est la jouissance propre à l’être parlant, c’est quand même cet objet qui va choir lors de la mise en place du sujet qui va intéresser la jouissance.
Pour ce – il n’y a pas de rapport sexuel - vous verrez qu’on ne peut pas s’arrêter uniquement à ce qui s’est dit ce soir, bien que ce soit le plus important, parce que autour de ce corps qui est cette consistance imaginaire, il y a à voir la relation que cette consistance imaginaire a avec le réel et avec le symbolique. Nous n’avons pas pu achever la lecture de inhibition symptôme angoisse, mais en prenant ce texte par ce – il n’y a pas de rapport sexuel – nous aurions peut-être pu comprendre quelle question se posait à Freud, la difficulté rencontrée par Freud autour de ce texte, a bien à voir avec cette réalité sexuelle, qui est une réalité due au signifiant. Et c’est bien là la difficulté pour nous être parlants. Et c’est autour de cette consistance imaginaire qu’est le corps dans la relation avec le réel et le symbolique que Lacan a essayé d’apporter une réponse à la question posée par Freud dans son inhibition symptôme angoisse. Et vous vous souvenez que je vous ai fait remarquer que pour Lacan, à partir du moment où il s’est servit de ses ronds de ficelle, ce n’est plus inhibition symptôme angoisse, mais inhibition angoisse symptôme. Le – il n’y a pas de rapport sexuel - permet d’éclairer cette difficulté que Freud a rencontré pour rendre compte de ce qu’est le symptôme, puisqu’en fait inhibition symptôme angoisse c’est la façon que Freud a eu d’essayer de définir ce qu’est le symptôme. Nous en avons vu la difficulté, difficulté qui peut être levée à partir de l’avancée théorique de Lacan autour du signifiant et de ce qui du fait de la parole va choir, c’est cet objet petit a.
Je pense que la prochaine fois j’essaierai de revenir sur ce – il n’y a pas de rapport sexuel – pour mieux éclairer ce qui peut être difficulté pour nous car il nous faut tenir compte de la jouissance, de ce qu’il en reste de cette jouissance lorsque le sujet barré se met en place.
Voilà ce que ce soir je voulais vous dire autour de ce – il n’y a pas de rapport sexuel -.
Le désir est là, si je puis dire éternel. Le désir, parce que il est, ce désir, éternel, va demander quelque chose d’une (structure). Mais je ne sais pas, je ne veux pas ce soir en dire plus. Enfin, simplement, c’est pour dire que rien ne peut s’en écrire, mais d’un point de vue mathématique, c’est quelque chose à ne pas oublier.
Le désir aura à voir nous dit Lacan dans la signification du phallus avec le fait qu’il vient de la réponse qui est donnée à tous les besoins d’une part et d’autre part de ce qu’il a à voir avec l’amour. Il y a quelque chose de propre, de particulier qui le sépare de l’amour.
C’est la marque propre du désir, parce que résultant de la demande, demande de satisfaction des besoins et demande d’amour. Nous verrons ça une autre fois. Lacan le dit très bien dans la signification du phallus et dans les formations de l’inconscient. Car la signification du phallus et la direction de la cure c’est quand même deux textes écrits au moment où il faisait ce séminaire les formations de l’inconscient.
Questions
Intervenant :
Je n’ai pas bien saisit le rapport du symptôme au savoir.
Solange Faladé :
Le symptôme c’est le savoir, c’est toute cette batterie de signifiants, c’est cela le symptôme. C’est un savoir qu’on ne sait pas. Lorsque Élisabeth vient voir Freud, elle s’adresse à lui parce qu’il sait de quoi est fait son symptôme. C’est ce savoir qui lui échappe à elle. C’est ce savoir qu’elle vient demander à Freud. Le symptôme qui nous intéresse nous analystes, ce n’est pas ce qui fait signe, c’est ce qui a avoir avec le signifiant. C’est ce qui a avoir toujours avec ce qui représente le sujet. Et cette batterie signifiante que je vous avais fait la dernière fois, toute cette batterie de S1 en relation avec le S2, c’est ça le savoir. Si vous les reprenez sous la forme du discours analytique, (Solange Faladé écrit le discours analytique au tableau) on voit bien que ce qui est produit c’est toute la batterie de S1, ce qui permet que le S2 vienne à la place de la vérité, ce qui permet que au bout du compte cette vérité, de – il n’y a pas de rapport sexuel – puisse venir se nouer au S2. Le symptôme c’est cela.
Pourquoi le fait que ce soit du savoir, du savoir qui ne se sait pas...Nous sommes au niveau de l’inconscient. Souvenez vous de ce que j’ai dit lorsque nous mettions ceci en place, que ce S2 qui ne peut pas avoir un autre signifiant pour lui permettre de signifier – c’est parce que nous avons à faire à un savoir qui ne se sait pas, au niveau de l’inconscient, le symptôme c’est une batterie, c’est la batterie signifiante, c’est le savoir, mais le savoir qui se dérobe au sujet. C’est ce savoir qui ne veut rien savoir, si je puis dire, de la vérité, qui résiste à la vérité.
Dans le premier temps où le sujet vient nous voir, il vient avec ce qui de la vérité résiste au savoir.
Je pense qu’on peut très bien comprendre, si on reprend le discours de l’analyste, ce qui est produit, ce sont tous les S1, ce qui permet à S2 de venir à cette place de la vérité, où justement cette vérité peut se nouer au savoir. Rappelez vous Lucie R. Elle raconte son histoire. Elle omet quelque chose qui a avoir avec ce qui s’est passé récemment, là où elle habite, avec son patron. Freud lui pose la question. Et elle en parle immédiatement. Freud lui dit : mais pourquoi vous n’en n’avez pas parlé ? Elle lui répond : c’est parce que je ne savais plus. C’est ce savoir qui est ce qui se dérobe, ce qui ne sait plus, et ça a avoir avec son symptôme, son symptôme d’odeur de brulé, d’entremet brulé, et ensuite odeur de cigare, enfin tout ce que Freud a pu remettre en place, autant de savoir qui échappait à cette gouvernante. Il avait noté qu’il ne pouvait pas être accroché. Avec Lucy R on peut très bien comprendre aussi. Souvenez vous de cette observation, à la fin, Lucy se dit que après tout, les choses ne vont pas si mal. Elle reste avec son désir pour son patron, mais elle accepte que ce désir ne soit pas satisfait. Nous avons à faire à une hystérique avec son désir insatisfait. Elle accepte que son patron de son coté tourne dans le sens qui est le sien, si on reprend ce que Lacan nous dit avec les deux anneaux : elle, elle est cet anneau qui tourne dans son sens, et lui dans le sien. Elle l’accepte, puisqu’elle accepte aussi qu’il ne puisse pas y avoir entre elle et cet homme autre chose que ce qui est que leurs vies, chacune tourne de son coté, et elle reste avec son désir. Mais ça ne l’empêche plus de vivre, au contraire. Elle est contente. Elle est à coté de lui. Ça lui suffit.
Reprenez l’observation de Lucy R, je crois qu’au début de l’année je l’avais reprise pour justement souligner ce qui était du savoir, du savoir qui échappe, et c’est ça le symptôme. C’est le symptôme, c’est ce savoir qui échappe. Reprenons le graphe de Lacan, ce message, ce s(A), ce signifié de l’Autre, ce message qui est reçu du grand Autre, c’est du savoir, mais avec ceci que ça reste opaque : c’est ça le symptôme. Lacan parle de l’opacité du symptôme à propos de s(A) dans subversion du sujet. Le message qui nous vient de l’Autre c’est bien toute cette batterie de signifiants, de S1 de l’Autre que nous recevons.
Bien.
(1) voir aussi – le moi et la question du sujet : 1988-11-08