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Le symptôme V

09 janvier 1990
Document de travail

J’ai été occupée pendant ces quelques jours de vacances, on appelle ça des vacances, j’ai été occupée, alors que je ne le pensais pas, par, non pas tant ce que la presse a pu nous faire savoir dans un premier temps, mais par un papier que j’ai reçu, signé de cinq personnes, et ce papier avait pour titre - vers une instance ordinaire…ordinale – vous voyez… Donc j’ai été occupée, et au tableau je vous ai marqué – Besetzung – c’est un terme que Freud emploie assez couramment qui a été traduit par – investissement – et en dessous j’ai écris en petit – Besetzt – pour dire – investi – mais aussi, ça veut dire – occupé -. Donc, j’ai été occupée au point de porter tout mon investissement sur ces questions, ce qui a fait que le travail que j’avais commencé pour ici, je l’ai laissé. Enfin, je ne l’ai pas tout à fait laissé. Je l’ai laissé quand même, parce que ce que je vais vous dire intéressera le symptôme à un moment, mais ce n’est pas à partir de ce que j’avais pensé faire. C’est à partir du travail que m’a obligé à faire ce texte – Vers une instance ordinale -.

Alors en le lisant, puisque c’est par rapport à l’Europe qui doit bientôt venir, l’Europe de 93, puisqu’on y soulevait le problème du statut unique du psychanalyste – est-ce qu’il peut y en avoir plusieurs, je ne sais pas – j’ai pensé à ce qui se disait au moment du veau. Cette fois ci ce n’était pas le gouvernement qui essayait de nous faire savoir, le veau, vous vous souvenez, le veau, il y avait le veau aux hormones qui ne pouvait pas circuler, (inaudible), et puis il y avait celui qui a tété pendant des mois, un certain nombre de mois pour qu’on puisse dire veau. Mais cette fois-ci ce n’était pas le gouvernement, mais des personnes qui se disent du coté de la psychanalyse. Donc, j’ai pensé au veau, et je me suis dis : c’est quand même curieux de nous proposer un texte qui fait penser au veau un texte qui essaye de donner ce qui pourrait permettre de reconnaître un psychanalyste, et là aussi on se demande pourquoi c’est du coté de ceux qui se disent psychanalystes que l’on peut lire pareil texte.

Puisque vous savez que pour reconnaître un psychanalyste, et savoir si on peut dire analyste, c’est une chose pas si facile, c’est une chose qui a tenu le mouvement analytique, les sociétés analytiques pendant des années, et que tout ce que Lacan a pu trouver à dire en 1975, lorsque la question lui avait été posée quelques jours auparavant aux journées des cartels, ce qu’il a pu dire, et il l’avait réservé pour le dire à son séminaire, c’est qu’on nommait des AME, c’est à dire les analystes membres de l’Ecole, parce que disait-il alors, parce qu’il font bon effet, bon effet, entendez qu’il peut soutenir ce que Lacan a appelé le discours analytique, qu’on peut dire qu’il y a de l’analyste, non pas un analyste mais de l’analyste et il ajoutait : On ne sait pas s’ils feront toujours bon effet. C’est à dire : on ne sait pas si plusieurs années après ou moins, on pourra toujours dire qu’il y a de l’analyste.

Alors, c’est curieux, et quand on pense que certaines personnes qui ont signé ce papier, ont assisté à ces travaux, ces discussions, c’est curieux de penser qu’on va pouvoir établir un ordre des psychanalystes, c’est à dire des personnes à qui un jour on tamponnera leur carte et on dira : ils sont analystes, ils sont analystes à vie – sacerdoce in aeternum – On a fait de tel, quelque chose qui serait le prêtre pour toujours. Ca ne peut que faire rire. Et nous avons toujours à nous demander, si là où nous sommes à cette place, on peut dire qu’il y a encore de l’analyste. Donc, c’est curieux de vouloir donner des textes, des textes pour le législateur, car ce n’est pas le législateur qui nous propose ces textes. C’est un texte qui est proposé au législateur pour qu’on puisse reconnaître qui est analyste, on puisse parler de la formation du psychanalyste.

Alors que vous savez, Freud, à l’écoute de ses patients, et tout particulièrement de ses patients hystériques, a trouvé que pour former un analyste, il fallait d’abord le mettre au travail, c’est à dire, ce que Lacan ici, a essayé avec ses formules qui partent du discours du maître, j’y reviendrai tout à l’heure, ce que Lacan a essayé d’écrire ici et le mettre là (Solange Faladé écrit au tableau le discours de l’analyste) le sujet au travail, le sujet qui se forme pour peut-être devenir analyste, ça, on ne le sait pas encore, mais de toute façon, il y a d’abord à le mettre ici au travail, à faire en sorte que ce soit lui qui soit dans cette position, cette position du travail, qui est aussi la position de l’esclave, et que ce soit lui qui puisse fournir quoi ? Non pas ce qu’il est venu demander au maître, c’est à dire du savoir, mais il va produire quoi ? Ce qui l’aliénait au signifiant maître, ce qui l’aliénait au maître, et le savoir, le savoir qu’il espérait obtenir en mettant le maître à la question, ce savoir, et bien, du fait de ce travail analytique, va se trouver placé dans une position telle, dans une position qui le noue à la vérité, mais qui fait que de ce savoir, il n’en saura qu’une partie, c’est à dire qu’il ne saura jamais tout du savoir.

Donc, voici ce que Freud nous propose pour la formation d’analystes. Et pour cette mise au travail, il n’est pas possible de savoir, c’est à dire que rien ne peut être standardisé, de savoir d’avance le temps qu’il faudra (mettre). Alors vous voyez, nous sommes tout à fait loin, de ce qui fait qu’on peut dire que, on est veau, c’est à dire que ce n’est pas le lait de l’analyse que l’on vient téter, ce n’est pas du lait de l’analyse que l’on vient s’emplir, mais du travail que le patient va faire. Et le travail que lui-même va faire qui dans un premier temps fera que cette analyse pourra être thérapeutique, et ensuite devenir pour certains, hein, puisque ce qui règle l’analyse c’est nous dit Lacan le pas-tout, ce ne sont pas tous ceux qui se sont mis sur le divan pour faire ce travail, ce ne sont pas tous qui seront au bout du compte analyste. Donc un travail, un travail sur un divan nous dit Lacan qui le rapproche du (tripalium) c’est à dire du premier pas sur quelque chose de douillet, (mais) quelque chose qui peut parfois vous mettre à la torture, c’est sur pareil divan, que le travail se fait dans un premier temps. Dans un deuxième temps, s’il y a manifesté le désir d’être analyste, alors l’analyse sera une psychanalyse pure, nous dit Lacan, une psychanalyse didactique. Et au bout de cette psychanalyse didactique, peut être, on fera l’analyste.

Donc, vous voyez comme c’est insensé, c’est tout à fait hors de l’analyse que de prétendre qu’on va pouvoir faire un décret qui nous dira ce qu’est former un analyste et le temps qu’il sera nécessaire pour dire que celui-la est analyste alors que l’on sait que personne ne peut dire qu’il y aura de l’analyste pour toujours.

Alors, ça m’a beaucoup occupé, et même plus, préoccupé, et j’ai donc passé beaucoup de mon temps à voir ce qu’il y avait à faire et à réfléchir sur ces papiers. Alors je me suis demandé commet, puisque mon Dieu, j’ai passé tout mon temps à cela, je pouvais le raccorder au symptôme. J’y ai pensé un moment, je me suis posé la question de savoir si après tout, ce qui se présentait à nous n’était pas à mettre dans la catégorie de ce que Lacan a appelé – le symptôme social -. Il m’est apparu que non, et je me suis dis que c’était peut être trop nous éloigner de ce qui nous intéresse ce soir et c’est pourquoi je ne parlerai pas du symptôme social, bien que pour nous ça présente de l’intérêt. Et nous aurons l’occasion d’y revenir sûrement, puisque à cause de ce symptôme social, j’ai du me pencher à nouveau sur La psychanalyse à l’envers, puisque c’est autour de ces quatre discours que Lacan s’est efforcé de définir, de dire ce qu’est le symptôme social.

Et là, je le dis en passant Lacan donne une définition du prolétaire qui n’est pas la définition de Marx. Il commence, certes, par nous dire que le symptôme vient avec Marx, mais il faut aussi s’intéresser à ce que Hegel a pu dire, puisqu’il essaie de traduire ses discours, ce qu’il a appelé ses quatre discours, à partir de la dialectique du maître et de l’esclave. Il y a le discours du maître, et ce discours du maître nous dit Lacan, c’est l’équivalent du discours de l’inconscient. L’inconscient est à la place du travail, de l’esclave, et l’inconscient ne cesse pas de travailler. Le maître ne lui en laisse pas le temps. Le maître a ses exigences et ne lui en laisse pas le temps.

Puisque j’ai parlé de ce symptôme social, à la place de celui que Lacan a appelé le prolétaire, non pas parce que son travail est toujours pris par le maître, mais parce que nous dit-il depuis les temps féodaux, jusqu’à cette époque qui est notre époque où le maître est le capitaliste, depuis ce temps, le savoir de celui qui est à la place de l’esclave, son savoir est ravi par le maître, c’est à dire que le maître ne lui en laisse plus la possession, et ce que de ce savoir il peut faire, le maître également s’en saisit, (inaudible) de la science, mais je ne vais pas m’y attarder ici, le maître s’en saisit, ce qui fait qu’on a à faire, à ce qu’il a appelé le prolétaire. Le prolétaire va être mis à la place de l’esclave, va donc être obligé de travailler, c’est pas le prolétaire de Marx, et il y a toute une série de phénomènes qui vont se produire, phénomènes qui ressemblent à ce que Marx a pu dire autour de la grève, autour de l’émeute, et que sais-je encore, mais ceci nous dit Lacan, parce que c’est du fait du symptôme social que ces effets se manifestent, enfin il le développe, je ne le développe pas ici. Ce qui est là, peut être déchiffré, et comme tout symptôme, on peut en saisir le sens.

Je ne sais pas si on peut parler de symptôme social dans ce qui se présente à nous autour de la psychanalyse. Je ne sais pas si on peut parler de symptôme social uniquement parce qu’on peut dire qu’il y a quelque chose d’une idéologie, on peut dire (inaudible), délation, non pas seulement du veau, mais semble-t-il maintenant du psychanalyste (y est inclus), je ne crois pas qu’on puisse parler de symptôme social. Et comme ce n’est pas à moi d’essayer de voir ce qu’est le symptôme qui anime chacun de ces sujets qui ont signé ce papier, j’arrêterai là ce que pour ce soir je voulais dire autour de ces papiers.

Alors puisque j’étais dans le séminaire sur la psychanalyse à l’envers, et que j’étais donc à travailler les discours, les quatre discours, je me suis dis que nous allions pour aujourd’hui, poursuivre notre travail sur le symptôme en nous servant de ces quatre discours, tout au moins de trois, puisque je n’ai pas marqué le quatrième qui est le discours de l’université.

Vous vous souvenez, lorsque nous nous sommes quitté, la question de la jouissance était là, apportée par ce que Freud avait pu dire de l’Homme aux loups, l’Homme aux loups qui refuse une jouissance marquée par la castration et qui en reste, pas de façon définitive nous dit Freud, ni même pour ce qui intéresse la névrose infantile, en reste à cette jouissance, à la jouissance qui peut être obtenue par le coït anal, c’est à dire que c’est une jouissance qui intéresse, parlons comme Freud, cette zone érogène qu’est l’anus. La jouissance du symptôme, nous rappelle Lacan, c’est déjà dans Freud, c’est une jouissance fourrée. Et Lacan nous dit que cette jouissance a à voir avec le champ de l’Unlust, c’est le champ du déplaisir.

Je voulais partir donc, de cette jouissance, de ce qui est là, fixation, partir aussi du savoir, et je pense, vous vous souvenez, que lorsque nous avons étudié plus à fond, sans pour autant avoir fait le tour de la question, lorsque nous avons étudié la psychose, le sujet de la psychose, nous sommes arrivés à cela que le rapport du psychotique au savoir était un rapport qui vient marquer d’une certaine façon la structure de la psychose et qu’à partir du savoir il nous serait possible, comme Lacan l’a apporté dans son séminaire l’objet de la psychanalyse, il serait possible de démarquer chaque structure. Ce soir, je ne vais pas partir de là.

Je pars du discours de l’hystérique pour parler du savoir et de la jouissance dans le symptôme.

Pour connaître le symptôme analytique, Freud nous dit que c’est l’hystérique qui lui a permis de saisir ce qu’est le symptôme, le symptôme analytique, le symptôme qui peut être analysé, et non pas l’obsessionnel. L’obsessionnel, il s’en occupait depuis plus longtemps, mais c’est l’hystérique qui lui a permis de saisir ce qu’est ce symptôme. Et Lacan, fidèle à ce que Freud a apporté et découvert, nous dit que ce qui peut s’écrire du symptôme ne peut l’être qu’à partir de l’hystérique. Et c’est pourquoi il a écrit ce qu’il appelle le discours de l’hystérique, le discours de l’hystérique qui est ici : C’est à dire que le sujet qui était en position de vérité vient là à la place du maître, du S1, vient à la place de S1. Il va mettre le maître, le professeur Freud à la question, va véritablement torturer Freud pour avoir du savoir. Et le savoir qu’il a, puisque l’hystérique ne cesse de demander au maître de travailler, tout comme le maître le demande à l’esclave, le maître dans cette position donc, doit toujours travailler, travailler pour produire du savoir. Mais c’est un savoir qui ne satisfait pas l’hystérique. On verra tout à l’heure pourquoi ce savoir ne satisfait pas l’hystérique. Il y a donc du savoir qui est produit.

Et ce qui était le reste dans le discours du maître, va venir ici en position de vérité, c’est à dire que c’est là quelque chose qui échappe à l’hystérique, quelque chose dont l’hystérique ne sait que faire, mais quelque chose qui peut aussi lui servir pour être ce qui cause le désir chez l’autre.

Alors, savoir ici, la jouissance là ou cette forme de reste de jouissance, et qu’est-ce que vous voyez tout de suite ? …Puisque…. Lacan nous met que le savoir et la jouissance ne peuvent pas se conjoindre dans ce qui nous intéresse, c’est à dire dans le symptôme.

Si nous prenons l’exemple d’un cas bien connu de nous, qui est ce cas d’Elisabeth Von R. un des cas des études sur l’hystérie qu’est-ce que nous voyons ? Nous voyons que Elisabeth vient voir, après avoir vu le professeur Breuer, vient voir le professeur Freud, et espère que le savoir qu’il détient va pouvoir la guérir ou tout du moins lui donner la clef de ce qui la dérange c’est à dire de cette paralysie des membres inférieurs. Elle vient chez Freud, pour cela. Et Freud qui est un bon clinicien, fait un examen. Cet examen l’arrête car il ne trouve rien que la neurologie peut expliquer de cette paralysie. Par contre, il trouve un point qui le déroute. Il remarque que lorsqu’il examine un certain endroit de la cuisse, de la jambe, d’une partie du membre inférieur d’Elisabeth Von R. il y a là quelque chose d’une jouissance. Il conclue que cette paralysie n’a rien à voir avec la neurologie. Il met en place tout son attirail et il fait ce qu’il a l’habitude de faire : (inaudible) l’imposition des mains. Et il est toujours intrigué par cette jouissance, jouissance qui, il faut le dire, échappe à Elisabeth. Elle manifeste de la jouissance lorsqu’on trouve cet endroit, lorsqu’on est à cet endroit, que Freud appellera une zone hystérogène inhabituelle. Elle manifeste de la jouissance, mais cette jouissance lui échappe. Freud l’interroge sur ce qui a pu se passer et au bout d’un certain temps, elle peut dire qu’à cet endroit là, son père, lorsqu’elle le soignait, avait l’habitude de poser le pied, ce pied qu‘elle soignait. Donc, le travail que Freud fait, son insistance, permet à ce savoir refoulé de revenir. Mais vous voyez bien que ce savoir ne se conjoint nullement avec la jouissance, la jouissance qui a lieu en ce point du corps d’Elisabeth.

Alors, ceci, Freud nous donne cet exemple parce qu’il paraît très clair, mais il a fallu quand même un certain temps à Freud pour reconnaître effectivement que chez l’hystérique, savoir et jouissance ne se conjoignent pas.

D’ailleurs, quelques années plus tard à propos de l’obsessionnel, de l’Homme aux rats, et c’est à propos de l’Homme aux rats qu’il (parle) d’une jouissance fourrée. Il aura l’occasion de déceler aussi, de découvrir (que) cette jouissance qui échappe tout à fait à l’Homme aux rats lorsqu’il en parle et le savoir qui est là du fait de cette jouissance, là aussi ne se conjoignent pas.

Donc, dans le symptôme savoir et jouissance ne se conjoignent pas, alors que dans les autres formations de l’inconscient, et prenons par exemple le mot d’esprit. Je crois que c’est assez évident qu’il ne peut pas y avoir de mot d’esprit sans que une certaine jouissance l’accompagne. C’est à dire que là, prenons, je ne sais pas quel mot d’esprit de Freud, autre que famillionnaire, prenons l’histoire du veau d’or, puisque nous sommes dans le veau. C’était, (1) je ne sais plus qui… de la société berlinoise vraisemblablement puisque je crois l’auteur est de ce pays, et il dit : qu’on apporte le veau d’or ! C’est à dire que ce riche homme qui recevait, et il y avait autour de lui bon nombre de personnes qui se précipitaient, donc c’était le veau d’or qu’on adore, et la personne à qui la chose est dite répond : Pour un veau, il est bien avancé en âge. Donc, ceci ne peut se dire qu’accompagné de la jouissance. Il y a là un savoir qui est accompagné de jouissance. Si ce n’est pas accompagné de jouissance, on ne peut pas parler de mot d’esprit.

De même ce que Freud a découvert (inaudible) c’est à dire le rêve, dans le rêve il y a tout le savoir qui se déroule. Le rêve d’Irma est le plus parlant, l’injection à Irma. Mais en même temps, dans ce rêve, va s’accomplir, ce qui ne peut pas s’accomplir ailleurs. Vous savez que la chanson dit que quand on rêve tout est permis. Et effectivement Freud, lorsqu’il fait le récit, rapporte ce rêve, lorsqu’il conclut, il dit qu’il y a là, accomplissement du désir.

Les formations de l’inconscient, c’est à dire ce que l’inconscient va mettre en forme, à savoir, le rêve, le mot d’esprit, l’acte manqué… bref, ces formations là s’accompagnent, savoir et jouissance sont conjoints, alors que pour le symptôme qui est aussi une formation de l’inconscient, dans le séminaire sur l’angoisse, j’y ai fait allusion rapidement le samedi où Luc Vachet nous a parlé de Hegel et de la dialectique du maître et de l’esclave, et de ce qui est là mis en forme, par l’esclave, l’esclave étant pour nous l’inconscient, Lacan nous dit que pour ce qui est du symptôme, et il le dit dans son séminaire sur l’angoisse, il dit que là… il nous parle de la mise en forme du symptôme.

Je pense que ceci va rappeler certaines choses à ceux qui étaient à l’EFP puisque le dernier congrès devait se tenir à Bordeaux avec pour titre : Les formes du symptôme, et c’était à partir de ce passage de Lacan, de ce passage dans l’angoisse, que ce titre avait été retenu comme tel.

Donc, le symptôme, ce qui caractérise le symptôme, et c’est d’abord grâce à l’hystérie que Freud a pu le découvrir, c’est que savoir et jouissance ne se conjoignent pas, et c’est ce que Lacan dans son écriture nous illustre en montrant que dans le discours de l’hystérique savoir et jouissance ne se conjoignent pas. Et le discours de l’hystérique est là comme ce qui permet de saisir ce qu’est le symptôme analysable. Et Lacan nous dit que pour les autres structures, les autres structures qui peuvent relever d’une analyse, lorsque ça peut relever d’une analyse, il faut qu’il y ait une hystérisation possible. C’est à dire, il faut amener le sujet qui vient pour une analyse, et lorsqu’on pense qu’une analyse est possible, il faut amener ce sujet à hystériser, c’est à dire à tenir le discours de l’hystérique, pour qu’ensuite on puisse lui faire prendre la place qui sera la sienne dans le discours analytique.

Alors, tout à l’heure, je vous ai dit que l’hystérique ne cesse pas de faire travailler le maître car le savoir qui lui est apporté ne peut jamais la satisfaire. Plus exactement, l’hystérique trouve sa satisfaction justement, dans ce qui ne peut la satisfaire. Son désir, nous dit Lacan, est un désir insatisfait. Ceci fait qu’elle met le maître toujours au travail, car le savoir qui lui sera proposé, ne lui conviendra jamais, ne la satisfera jamais.

Ceci me donne l’occasion de revenir sur les formules de la sexuation, d’y revenir, parce que samedi, il m’est apparu que certaines choses que j’avais pu dire dans les années précédentes ou n’ont pas été bien saisies ou peut-être n’ont pas été bien dites par moi.

Alors, cette hystérique, cette hystérique avec ce savoir qui ne peut jamais être satisfait, j’avais commencé à vous en parler l’année où nous avons travaillé le refoulement, je vous avais dit que c’était là une énigme pour la fille, la fille qui se trouve comme sa mère, castrée, qui de ce fait va se détourner de sa mère nous dit Freud, et ceci est repris par Lacan, pour nous dire que ce qui va se passer, ce qui fait que la fille se détourne de sa mère pour aller vers le père, c’est quelque chose de l’ordre d’un transfert analytique, la fille va vers le père, pourquoi ? Parce que celui-ci a l’organe qui lui manque et qui manque à la mère. Et elle espère de lui qu’un jour elle pourra l’avoir.

Et elle va s’apercevoir non seulement qu’elle ne l’aura pas, que non seulement elle ne peut avoir un enfant de son père qui pourrait être substitut de cet objet qui lui manque, tout simplement pour une question qui est qu’à son âge elle ne peut espérer avoir du père un enfant. Elle ne peut pas obtenir cette chose, mais elle ne peut même pas avoir quelque chose du père qui permettrait que soit levée l’énigme qui concerne le fait d’être une fille. C’est à dire que du père, du père, parce qu’il n’y a aucun signifiant de la féminité – la Femme ne peut être que barrée – parce qu’il n’y a aucun signifiant de la féminité dans l’inconscient, alors qu’il n’en est pas de même pour l’homme, ce père ne pourra pas lui donner aucun signifiant, ne pourra rien lui apporter qui lui permette de lever son énigme, énigme qui concerne le fait d’être une fille et c’est pour ça que le père de l’hystérique est vécu comme impuissant.

Et j’y insiste parce nous partons de l’observation de Freud, Dora, où effectivement il se trouve que le père de Dora est impuissant, ça, Dora le sait, ça lui pose un problème, pour savoir qu’est-ce qui peut se passer entre son père qui ne bande pas, qui est impuissant et Madame K. qui est pour elle, le prototype de la femme. Donc, parce que nous sommes partis de cette observation, il arrive très souvent, et c’est ce que j’ai entendu samedi, qu’on dise que les pères d’hystériques sont impuissants. Les pères d’hystériques …vous vous rendez compte de ce que ça serait…Donc, c’est le fait que le père de l’hystérique est vécu par l’hystérique, par sa fille comme impuissant, c’est qu’il ne peut pas lui donner ce qu’elle lui demande pour résoudre son énigme concernant la Femme, concernant la fille : Qu’est-ce que c’est qu’être femme ? Il ne peut lui donner ce sexe qu’elle espérait avoir, ni ce qui pourrait être le substitut : un enfant, et il ne peut pas non plus répondre de quoique ce soit qui puisse l’éclairer sur ce que c’est qu’être une femme, puisque ce signifiant, le signifiant de la féminité, n’existe pas.

C’est ça qui fait que le père de l’hystérique est vécu comme impuissant et que donc le savoir qui lui sera assorti, ne pourra jamais la satisfaire, puisque là même dans ce savoir il n’y aura aucun signifiant qui puisse lui permettre de dire, de donner une réponse à sa question : qu’est-ce que c’est qu’être une femme ? Qu’est-ce qu’on fait avec un sexe qui est le sexe de la femme ?

Alors, c’est pourquoi l’hystérique, et l’observation de Dora nous le montre, va se tourner vers une autre femme. Il va y avoir cette relation homosexuelle, cette relation qui est non pas une homosexualité perverse, cette relation auprès d’une femme, d’une femme qui peut-être elle, parce qu’elle est femme, pourra lui dire quelque chose de ce que c’est qu’être une femme. Et c’est ça la relation de Dora avec madame K. C’est pourquoi aussi, Lacan nous parle de ce grand phi, de cette présence réelle.

Et ce grand phi, il semble que lorsque j’en ai parlé j’aurai dis que c’était le signifiant manquant. Or ce que j’ai cru avoir dit, mais peut-être que je n’ai pas fini ma phrase, ce que j’ai cru avoir dit, c’est rappelant cette thèse de madame Dubreuil je crois, qu’elle m’excuse de ne plus très bien connaître son nom, celle qui a eu une préface de Lacan, et à ce propos Lacan nous dit que dans cette thèse, cette dame, pour parler du grand phi, a dit qu’il s’agissait du signifiant manquant, et qu’il rectifiait. Et il rectifie, et il nous a dit qu’on ne peut pas parler de signifiant manquant, qu’à partir du moment où on parle d’un signifiant ou il est absent comme dans la chaîne du psychotique où il y a l’absence de S2, ou s’il est là signifiant, on ne peut pas dire que c’est un signifiant manquant, que le grand phi c’est le signifiant du manque, le phallus absolu, c’est le signifiant du manque. Et c’est le signifiant de ce manque qui est la question de l’hystérique, de Dora dans cette observation, qui fait que Dora espère pouvoir trouver ce signifiant, cette présence réelle nous dit Lacan, derrière le voile qu’elle est madame K. et que c’est aussi ça qui fait qu’elle s’adresse à la Madone de Dresde, pour espérer trouver ce signifiant, ce signifiant du manque.

D’ailleurs, à propos de signifiant du manque, le signifiant qui vient dire que dans le lieu du père, lieu de tous les signifiants, il y a une place vide, mais comme je vous ai dit, ce n’est pas l’équivalent du trou, qu’on trouve chez le psychotique, cette place vide, il y a un signifiant pour le dire. Et Lacan dans son Ecrit la subversion du sujet, je crois que l’année dernière je vous en ai donné le passage, je crois que c’est à la page 819, lorsqu’il essaie, d’écrire, de trouver une formule mathématique pour ce signifiant qui vient marquer le manque dans l’Autre, il nous dit que c’est racine de moins un, vous retrouverez l’opération dans son texte, il nous dit que c’est racine de moins un, et puisqu’on peut le prononcer, puisqu’il y a là quelque chose qui est énoncé, ça suffit pour dire qu’il y a signifiant. Donc, lorsqu’on dit signifiant, signifiant de grand S de grand A barré, ça veut dire qu’on a à faire à quelque chose qui peut se dire, qu’il y a un mot pour le dire, qu’il y a un signifiant pour le dire. Donc il ne peut pas y avoir de signifiant manquant. Il peut y avoir l’absence d’un signifiant, mais à ce moment là on ne le dit pas, il n’est pas dans la chaîne du psychotique, et il peut y avoir un signifiant, un signifiant qui vient signifier le manque.

Et le signifiant qui vient signifier ce manque qui est le problème de la femme, et de sa quête pour lever cette énigme concernant la féminité, c’est ce grand phi, ce grand phi qu’elle espère trouver, qu’elle met du coté d’une femme parce qu’elle sait que chez le père elle ne trouvera aucune réponse, le père n’a aucun mot pour lui dire quoique ce soit de la féminité et c’est ça qui, fait son impuissance.

Puisque je parle de samedi, avant de revenir au symptôme, je me suis aperçue et ça a été dit, qu’ici, c’est, nous dit Lacan, le père de la horde primitive, et dans le séminaire Encore je crois qu’il met là le S1. Bon.

Pour le coté Homme, il dit que parce qu’on est du coté de ce qui peut être universel, le sujet s’écrit là : S barré. Du coté Femme, il écrit grand S de grand A barré. La question avait été posée l’année dernière lorsque je vous ai dit que ce grand S de grand A barré c’était l’équivalent du S2, (5) lorsqu’on écrit la chaîne de la subjectivation, que c’était l’équivalent du grand S2. Mais ça ne veut pas dire que lorsque Lacan l’emploie ici, c’est l’équivalent du grand S2. C’est à dire qu’on ne va pas faire comme ceci : Mettre grand S2 ici, avoir le sujet là, et le petit a, faire comme si c’était l’écriture qu’il nous propose pour le discours du maître. Ici, (2) ce S (A barré) Lacan le met en relation avec La Femme qui n’existe pas, avec La Femme barrée, pour nous dire le rapport que La Femme a avec le vide, avec les manques, ce n’est pas pour nous dire que c’est du S2, car il l’aurait dit quelque part dans son séminaire Encore. La femme a à voir avec le manque, avec le vide, avec ce qui fait qu’elle ne peut rien dire elle-même, il n’y a aucun mot pour elle pour dire ce qu’est la féminité, puisque La Femme n’existe pas. Tout ce qu’elle peut faire, c’est de parler autour de ce vide, de ce manque. Et elle peut en parler parce qu’ici elle est en rapport avec le grand phi, avec le phallus, et c’est ce qui permet qu’elle puisse avoir des signifiants, non pas pour dire ce qu‘est une femme, il n’y a aucun signifiant, mais pour pouvoir parler autour de ce vide, de ce qui là manque. C’est ça, ce que ce S(A barré) veut dire, donc il ne faut pas espérer là reconstruire. Je ne crois pas que c’était ça l’intention de Lacan, lorsqu’il fait ceci, parce que lui-même l’aurait dit. Il nous signale bien qu’il en existe un tel que - pas phi de x - qui échappe à la castration, et il met ici grand S1, pour nous le dire, mais ici autant que je me souvienne, je n’ai pas vu dans ce séminaire le grand S2. Ce qu’il nous en dit, c’est autour du vide, du manque, de ce à quoi une femme est en relation, mais non pas ce qui vient là, ce qui permet de représenter un signifiant pour un autre signifiant.

Donc, ce petit a qui est là, du coté de ce qui permet de définir une femme, ce petit a qui est là, est là pour nous dire quoi ? Pour nous dire que une femme, si elle veut assumer la féminité, ce qui est sa féminité, elle ne le pourra qu’en acceptant d’être cet objet petit a, cet objet petit a qui a à voir avec le reste de jouissance, avec le déchet, que ce n’est qu’en pouvant être cet objet qui cause le désir, qu’elle pourra causer le désir de l’Autre, l’Autre homme, parce qu’à ce moment là, elle peut soutenir son fantasme et permettre que quelque chose d’une conjonction sexuelle puisse être. Mais ce n’est pas le fantasme qui se produit lorsque du sujet se met en place. C’est le fantasme que la femme va pouvoir soutenir si elle s’accepte être objet petit a, objet qui cause le désir.

Je crois qu’il faut en rester dans la mesure du possible à ce que nous dit Lacan

Alors, je reviens au symptôme par le biais du S1 puisqu’il m’est apparu samedi que là aussi il y avait quelque chose de difficile à saisir de ce qui s’était dit l’année dernière.

Le S1, pour qu’il y ait du sujet, il faut que lorsque le langage est apporté, lorsque le bébé reçoit le langage, il faut qu’il dise oui au S1. Alors, chaque structure dit différemment oui au S1.

Pour ce qui est de l’hystérique, c’est l’hystérique qui est au travail ce soir, et je dirai un mot des autres structures, pour ce qui est de l’hystérique, l’hystérique dit oui au S1, c’est à dire que l’hystérique… si on reprend certains passages dans l’Etourdit où Lacan parle de cet orang-outang qui jouit de tous et de toutes les femmes, il faut que pour l’hystérique cet orang-outang, celui-là qui jouit de tous et de toutes les femmes, ait existé car ça veut dire que d’elle aussi il aura jouit. Il faut qu’il ait existé et il faut qu’il soit mort, c’est à dire qu’on l’ait tué. C’est en le tuant que nous avons du S1. C’est en le tuant que nous avons de cet orang-outang un père, un Père-orang dit Lacan dans l’Etourdit (3) C’est à dire que tant qu’il n’est pas mort, tant qu’il n’a pas été tué, il n’y a pas de père. Freud dit dans Totem et tabou qu’il n’y a de père que de père mort. Et ceci Lacan l’a toujours maintenu. Donc, le S1, le fait de dire oui au S1, c’est dire aussi oui au fait que l’Orang-outang a été tué et que ce n’est qu’après sa mort qu’il va devenir père. Ce n’est qu’après sa mort, qu’après l’avoir tué, que les fils vont se reconnaître comme étant ses fils, jusque là non, vont se reconnaître comme étant ses fils, et vont se reconnaître frères. Donc, il faut l’avoir tué.

Et pour l’hystérique, non seulement il faut qu’il ait existé, il faut qu’il se présente, il faut qu’il ait au moins un, nous dit Lacan, et ça c’est l’hystérique, au moins un qui échappe à la castration. Et lorsqu’on a été tué, mon Dieu on peut dire qu‘à ce moment là on ne peut plus vous castrer. Donc il faut qu’il y ait au moins un qui échappe à la castration. Et l’hystérique en disant oui au père, oui à ce S1, c’est que le meurtre du père est possible, le meurtre du père a été. Hommoinsun écrit Lacan, il l’écrit avec le H, car pour l’hystérique il faut absolument qu’il y en ait un qui échappe à la castration et pour mon Dieu s’assurer qu’il ne peut plus être castré (inaudible).

Il n’en est pas de même pour les autres structures comme je vous ai dit. Mais enfin, là je le rappelle pour l’hystérique parce qu’il y a eu des discussions samedi et ça fait partie de ce qui caractérise les symptômes hystériques. Il en faut au mois un qui échappe à la castration. Pour les autres structures, bien sur il y a eu un oui qui a été dit pour ce S1 puisqu’il y a du sujet, mais pour l’obsessionnel je vous ai dit, rappelez-vous, que pour l’obsessionnel ce oui, l’obsessionnel ne peut pas, le père mort, l’assumer. Et il est dans une position telle qu’il laisse penser, essaie de penser qu’il se pourrait que le père se soit tué lui-même. C’est à dire que son sentiment de culpabilité est tel qu’il lui est difficile d’accepter totalement d’avoir tué le père. Donc, dans son oui, il y aura ceci qui fait qu’il laisse une possibilité au fait que le père aurait pu lui-même se tuer.

* Pour le pervers il se pourrait qu’on puisse le ressusciter on pourrait de nouveau le faire jouir.

Quant au pervers, le pervers aussi a dit oui à ce S1, mais pour le pervers il se pourrait qu’on puisse le ressusciter. Il se pourrait qu’on puisse le ressusciter, parce qu’à ce moment là on pourrait à nouveau le faire jouir. Donc, chaque structure par rapport à ce oui dit au S1 vit ceci différemment.

Quant au psychotique qui a dit oui au S1 puisqu’il y a du sujet, le psychotique ne peut pas faire en sorte que la chaîne de la subjectivation se mette en place puisque le S2 ne peut pas s’écrire, donc, toute la question du petit a est posée, donc la question du fantasme et de ce qui fait que sur ce père de la Horde primitive, va pouvoir se mettre en place le père de l’œdipe. Donc quand la psychose éclate, c’est dans le réel que l’on trouvera ce S1 en tant que grand Autre persécuteur, enfin tout ce qui fait la pathologie du psychotique.

Donc pour nous résumer, ce qui nous intéresse directement concernant le symptôme, grâce à l’hystérique, Freud s’est aperçu et a du reconnaître que dans le symptôme il y a disjonction entre le savoir et la jouissance, mais il y a la jouissance, jouissance qu’il dira jouissance fourrée grâce à l’observation de l’Homme aux loups, jouissance qui peut échapper parce que se traduit par de l’Unlust nous dit Lacan, le déplaisir, mais cette jouissance est là et cette jouissance ne se conjoint pas avec le savoir, ce savoir que l’on demande au maître de fournir à tout instant de fournir toujours, de continuer à fournir car ce savoir ne satisfait pas totalement le sujet hystérique et il faut que tout sujet analysable passe par cela, par ce que Lacan a appelé hystérisation, donc ait un rapport au savoir, un rapport insatisfaisant au savoir qui fait que une analyse va être possible.

Mais, l’obsessionnel, son rapport au savoir sera marqué du doute. Ce soir nous n’avons pas envisagé cela.

Nous avons envisagé ce qu’il en est du rapport du savoir et de la jouissance dans le symptôme. Savoir et jouissance ne se conjoignent pas, mais la jouissance est là, est là sous une forme fourrée dans le symptôme.

Bien, voilà ce que ce soir je voulais vous dire, ce que j’ai été amenée à travailler, puisque comme je vous l’ai dit au début de notre réunion, avoir à m’intéresser aux quatre discours à la psychanalyse à l’envers m’a emmené à prendre le symptôme sous cette forme. Et à partir de ce moment là, c’est par le discours de l’hystérique que Lacan nous parlera du symptôme.


Questions

Marguerite Bonnet :
Si effectivement la femme dans la reconnaissance de sa féminité est en place de l’objet petit a, cause de désir et devant soutenir le désir de l’homme, vous avez dit que ça n’a pas à voir avec le fantasme.

Solange Faladé :
J’ai dit que ça n’avait pas à voir avec ce fantasme qui se met en place, avec la subjectivation, avec le sujet qui existe, enfin avec la subjectivation. Ce n’est pas le fantasme qui se met en place. C’est cet objet petit a, c’est ce à quoi elle doit s’identifier pour être, pour soutenir le fantasme de celui-là qui est ici, de l’homme.

Marguerite Bonnet :
Dans la logique du fantasme, Lacan au moment où il parle de la rencontre sexuelle, il dit qu’à ce moment là, homme et femme, chacun des deux viennent à la rencontre l’un de l’autre avec leur fantasme.

Solange Faladé :
Lorsque dans Encore, il reprend ceci, parce que Lacan, ce n’est pas un temps et c’est fini, mais forcement ils viennent l’un et l’autre avec leur fantasme. Et le fantasme de la femme, si effectivement elle essaie d’accepter sa féminité, va faire que, elle va être cet objet petit a qui va soutenir le fantasme de l’homme, car l’homme aime nous dit Lacan une image, et il joue sur ce fantasme avec ce j’âme (4) au lieu de dire j’aime. Ce qu’il aime, c’est en fait le fantasme que la femme lui permet de soutenir.

Une femme peut avoir son fantasme qui est que ce n’est pas uniquement parce qu’elle est petit a (qu’on est) mais c’est que i(a) son image narcissique convient aussi. C’est à dire qu’elle va essayer pour elle-même de faire recouvrir i(a) avec petit a, et c’est ça qui est la chose difficile. La chose difficile, c’est de s’accepter petit a.

Alors, une femme essaie de faire coïncider i(a) avec petit a, pour qu’elle puisse s’imaginer que ce qu’il aime c’est ce i(a) qui vient couvrir le petit a, mais Lacan dit qu’il asme, c’est à dire qu’il fait, il dit que du coté de l’homme c’est ce qui vient soutenir son fantasme qui fait qu’il reste avec cette femme.

L’amour peut être quelque chose tel, lorsque i(a) et petit a viennent se conjoindre. Il en parle dans le séminaire sur l’objet de la psychanalyse ensuite vous avez la logique du fantasme.

Ca ne veut pas dire qu’une femme n’a pas un fantasme. C’est pas ça. Une femme a un fantasme mais pour ce qui est d’être une femme qui cause le désir de l’homme, c’est en acceptant d’être ce petit a, c’est à dire que son image narcissique peut en prendre un coup…

Elle a son fantasme, mais dans ce qui est de sa féminité, de l’appréhension de sa féminité, et bien, elle va être pour celui-là, pour cet homme, ce qui cause son désir. C’est à dire qu’elle va être un petit a qui n’est pas forcément celui qui est dans son fantasme.

Que son fantasme lui permette d’accepter d’être ce petit a, que son fantasme lui permette de mettre cette image narcissique qui vient cacher ce petit a, si elle ne peut pas supporter d’être ce petit a, ce qu’il y a, c’est qu’en fait, si elle se pense, elle est asmée. C’est à dire que c’est dans la mesure où elle soutient le fantasme de son homme que les choses vont coller entre eux. Et pour soutenir le fantasme de son homme il faut qu’elle soit ce petit a. Ca ne veut pas dire qu’elle n’a plus de fantasme. Elle peut fantasmer qu’elle est la reine des reines, la princesse de tout ce que vous voulez ou Cendrillon, tout ce que vous voulez peut se trouver dans son fantasme. Mais si elle veut qu’il puisse y avoir conjonction entre celui qui est de ce coté son partenaire et elle, il faut qu’elle puisse être ce qui cause son désir.

Marguerite Bonnet :
C’est une position éminemment dangereuse.

Solange Faladé :
Dangereuse si on ne veut pas s’accepter…

Ca veut dire que c’est très dangereux d’être une femme ?

Marguerite Bonnet :
Il me semble qu’il y a là une brèche sur un masochisme.

Solange Faladé :
Le masochisme, ce soi-disant masochisme féminin dont Freud parle dans les problèmes économiques du masochisme, lorsqu’on le lit bien, c’est l’homme, qui est masochiste, c’est l’homme qui voit la femme dans cette position, celle qui doit subir le coït, celle qui allaite, celle qui a toutes ces positions vécues comme des positions où elle peut être que…si ce n’est pas souffrant, enfin, subir le sadisme de l’homme. Mais c’est l’homme qui pense ça.

Le masochisme dit féminin, est du coté de l’homme. Et nous avions étudié ce texte – le problème économique du masochisme – dans ce groupe lorsqu’il se réunissait à l’Ecole Freudienne de Paris rue Claude Bernard, ce n’est pas le fait de la femme.

Parce que là, vous êtes en train de dire que s’accepter objet petit a c’est masochiste…que s’accepter petit a pour une femme c’est se ranger du coté du masochisme.

Marguerite Bonnet :
J’ai dit ça semble être une brèche...

Solange Faladé :
Oui mais c’est pour vous dire que ce qu’on dit être le masochisme féminin qui se trouve dans les textes de Freud et je ne sais plus dans quel séminaire Lacan le reprend, je crois dans le séminaire sur l’angoisse ou à d’autres moments, pour dire qu’en fait, c’est le fait de l’homme. C’est l’homme qui attribut à une femme d’être masochiste parce qu’elle doit subir le coït, elle doit allaiter, enfin il y a toute une série de choses comme cela. Mais c’est l’homme, c’est du coté de l’homme, c’est l’homme qui dit cela.

XX :
Qui a-t-il à entendre lorsqu’il est dit qu’il n’y a pas de signifiant féminin dans l’inconscient ?

Solange Faladé :
Oui, dans l’inconscient il n’y a aucun signifiant qui vient marquer le féminin. Il n’y a aucun signifiant. Tout ce que Freud a pu trouver et je crois qu’on n’a pas trouvé autre chose depuis, c’est qu’il y a le passif. Et le passif est mis du coté de la femme, mais ce n’est pas le signifiant de la féminité. C’est mis du coté de la femme, et dans sa lettre 75 il écrit donc à Fliess et il reprend une partie je crois dans les pulsions lorsqu’il parle de l’activité et de la passivité, il dit que pour atteindre un but passif, une femme peut se montrer tout à fait active, pour atteindre un but passif, c’est à dire être ce qui peut causer le désir de l’homme, et donc subir entre guillemets, le coït, pour atteindre ce but passif, elle doit faire preuve de beaucoup d’activité. C’est une façon de nuancer l’actif et le passif, l’actif qui serait du coté de l’homme et le passif qui serait du coté de la femme. Il n’y a aucun signifiant qui permette à une femme de savoir ce que c’est qu’être une femme.

Alors, il y a tout ce qu’on met pardessus, la mascarade, tout ce que vous voulez. Tout ce qu’elle peut savoir c’est que si elle veut causer le désir chez un homme, elle ne peut le faire qu’en étant petit a, en se présentant comme étant pour lui cet objet qui va soutenir son fantasme.

Je sais bien que c’est un point difficile à …pas toujours facile à saisir, tout de suite on y met le masochisme, ou alors on en fait une image telle que… je vous ai donné l’exemple de Madame de Pompadour. Qu’est-ce qu’il y avait de plus exquisément femme, qui représentait la femme ? Mais en fait pour ce qui est d’être une femme là où une femme peut être, doit, est femme, et bien il n’y avait pas Madame de Pompadour, car elle répugnait aux relations avec l’homme qui serait venu lui marquer son manque, sa faille. Donc, ce n’est pas l’extérieur qui peut dire qu’on a à faire à une femme ou pas. Ca ne veut pas dire qu’on a à se présenter n’importe comment. Il y a l’image narcissique pour soi qui est là pour permettre de vivre, mais ne pas, sur cette seule image, dire qu’on a à faire à une femme. Je n’ai pas trouvé de meilleur exemple que la Marquise de Pompadour.

Donc nous nous reverrons dans quinze jours.


(1) Freud : Le mot d’esprit et sa relation à l’inconscient. Page 108. Gallimard.

(2) Au lieu du S(A barré) coté Femme

(3) L’Etourdit in Silicet 4 page 13

(4) Encore page 78

(5) Le Moi et la question du sujet 13 décembre 1988, et 10 janvier 1989