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Le symptôme XII

22 mai 1990
Document de travail

Je m’interroge : dans quel discours peut s’inscrire notre travail ? Je ne crois pas qu’on puisse l’inscrire dans le discours universitaire non pas que j’ai quoi que ce soit contre le discours universitaire, l’université m’a accueilli, j’y ai enseigné, j’étais chercheur scientifique, ce n’est donc pas que je récuse quoique ce soit du discours universitaire. C’est que je crois que nous avons à nous poser la question de ce que, lorsque nous nous rencontrons dans nos différents groupes de travail de ce que nous y faisons.

Certes nous partons de ce qui a été recueilli dans le discours de l’analyste dans le discours analytique où le savoir est vous le savez en position de vérité, que c’est à partir de ce savoir que nous nous efforçons d’en transmettre quelque chose, mais est-ce que ce savoir doit être mis en position d’agent ? Vous connaissez les 4 discours de Lacan, discours du maitre, de l’hystérique, de l’analyste et de l’université qui a à la place du signifiant maitre le S2 le savoir, ce savoir que nous essayons de transmettre, c’est certes à partir de ce qui a été recueilli dans le discours analytique, ce savoir qui a été mis en position de vérité et qui a pu être noué à la vérité, c’est bien à partir de ce savoir. Mais ce savoir qui est en position de signifiant maitre est-ce que c’est véritablement sous cette forme que nous transmettons le savoir ? Si c’était sous cette forme, ce n’est pas que la psychanalyse ne peut pas être enseignée et ne peut pas l’être à l’université, elle l’est, si ce savoir était transmis d’une façon telle que le discours de l’université puisse s’écrire, que faisons-nous de ceux-là qui ont fondé ce savoir, qui l’ont recueilli, qui ont fait une théorie, Freud d’abord, et ensuite Lacan et d’autres ? Est-ce que comme quelque part dans le séminaire sur les 4 concepts ils sont mis au placard ? C’est à dire que en fait ce qui est de la vérité qu’ils ont pu saisir, cette vérité, on en tiendra pas compte, ou très peu, puisque eux sont à cette place de vérité, de ce qui est caché.

D’autre part, qui formons-nous ? L’université, comme Lacan l’a montré forme des sujets prêts à enseigner d’autres personnes. Est-ce que c’est là vraiment notre visée ? Si c’était vraiment là notre visée, nous devrions nous, être dans cette position de petit a, de ce que Lacan a appelé des astudés, et à ce moment-là ceux qui seraient formés, et qui pourraient immédiatement se mettre à l’œuvre ce seraient des professeurs, des enseignants qui sont là pour transmettre ce qui est ce savoir que l’université prodigue à qui font appel à elle. Donc je ne suis pas sure que ce soit le discours de l’université.

Et en même temps je me demande ce que nous avons à faire de ce savoir nécessaire à être transmis pour que la formation du psychanalyste puisse être assurée. Il y a d’abord la transmission récurrente, comme a dit Lacan dans son article sur l’agressivité, la transmission récurrente c’est celle qu’assure le discours analytique, où au chevet du patient, patient qui deviendra peut-être analyste, est recueilli ce qui du savoir pourra être noué à la vérité.

Et puis il y a la nécessité d’une autre transmission. Et dans son premier séminaire, la premier qu’il a fait après avoir laissé la Société de Paris, il a parlé de transmission sur le mode universitaire. Qu’est-ce qu’il faut entendre par là ? C’est peut-être sur ça que nous avons à reblanchir, car je ne pense pas que de là peut venir ce qu’il a pu dire plus tard du discours universitaire.

Je n’irai pas plu loin, je vous fait par de ce qui me préoccupe à la fin de l’année. Et ce qui me préoccupe aussi, mais pas de la même façon, c’est ce qui déjà à plusieurs reprises depuis que nous nous rencontrons cette année a pu interroger certains d’entre nous et qui je dois dire n’a pas reçu de moi une réponse que j’ai pu trouver satisfaisante.

Ceci c’est ce qui a avoir avec l’émergence du sujet et sa relation avec l’objet petit a, ce que Lacan nous dit provenir de ce temps de la séparation et qui peut se faire grâce à la torsion. Naturellement, quand j’ai la dernière fois dit que de toute façon la torsion, c’était une façon d’arrêter la discussion, mais ce n’était pas une réponse. Ici nous nous passons de torsion, nous avons à faire à une autre surface topologique, donc cette surface topologique qui est là un tore, ne peut pas rendre compte de ce que Lacan essaie de nous apporter, de nous sensibiliser à ce qui se passe effectivement lors de l’émergence du sujet qui nous intéresse, du sujet de l’inconscient et de ce qui sépare ce sujet de l’inconscient de ce qu’on a pu dire du sujet ailleurs.

Alors, j’ai commencé par parcourir un certain nombre de séminaires de Lacan et puis je suis allée à ce séminaire sur l’objet de la psychanalyse, où il reprend la relation du sujet du savoir et de la vérité. Et je me suis arrêtée au séminaire du 15 décembre 1965, parce que là il avait repris un certain nombre de ces surfaces topologiques, et entre autres, partant d’une surface, une feuille de papier, il y fait une coupure telle que c’est une bande de Moebius avec un lambeau qui va choir, qui va pendre, et ce lambeau il en fait le petit a. Il nous dit dans ce séminaire que la bande de Moebius qui est ce bord, est la monture du petit a.

Dans ce séminaire il nous parle beaucoup du manque du sujet et de bien d’autres choses en particulier de la Bejahung. Il en fait le jugement d’attribution et donne comme exemple le petit Hans, le petit Hans qui dit-il ne s’occupant pas de l’existant va faire du phallus l’attribut de tout être vivant, de tout être animé. Donc pour lui tout être animé a le phallus.

Mais ce qui m’a surtout arrête et intéressé dans ce séminaire c’est ce qu’il nous dit du manque, du manque constitutif du sujet. Alors ça m’a fait revenir à ce fameux chapitre des 4 concepts, le chapitre où Lacan parle de la subjectivation, du rapport du sujet et de l’Autre, et je me suis dit qu’après tout, il nous dit ça en 69-70.Il essaie de nous faire saisir ce qu’il a à nous faire saisir avec les moyens qui sont les siens, là où lui-même en est. Alors, je me suis dit que plutôt que de m’acharner sur cette bande de Moebius, il en a déjà parlé, il ne s’en est pas encore servi comme il s’en servira plus tard, je me suis dit que peut-être c’était à partir de ce séminaire et de ce qu’il avait pu dire autour de ces années 63-64 que nous pourrions comprendre ce qu’il essaie là de nous faire saisir et je suis revenue donc sur des choses dont nous avons parlé l’année dernière. Mais peut-être qu’il y a à les reprendre différemment.

Dans un de ses premiers séminaires, lorsqu’il essaie de mettre en place ce sujet de l’inconscient, il nous parle de l’importance du signifiant C’est ce premier graphe qu’il avait essayé de mettre en place non seulement pour distinguer le Je du sujet – il mettra le Je ici et le sujet qui est ici - le Je qui est ce qui commence souvent le discours, mais qui peut ne pas s’y trouver, il nous dit que ce discours qui commence par ce Je. C’était l’exemple du premier trait d’esprit de Freud qu’il prenait. Et dans cet exemple celui qui parle, qui parle pour Hirch Hyacinthe, commence son discours par ce Je : Aussi vrai que Dieu me doit tous les biens, Je, étais assis à coté de Salomon Rothschild ; et il nous dit que en fait on peut ne pas s’en rendre compte, mais ce discours, ce discours de ce Je - donc de celui qui est là sujet puisqu’il nous explique que cette ligne qui va accrocher la première, c’est le discours commun - il nous dit que c’est là ce qui porte le discours de ce sujet qu’il va pouvoir écrire, mettre en place, ce qu’il n’avait pas pu faire avec les deux chaines de Saussure, signifiant et signifié. Il nous dit que ce discours a toujours quelque chose à voir avec le discours de l’Autre même s’il n’y paraît pas.

Alors reprenons ce que nous avons dit l’année dernière concernant (la mise en place) du sujet, nous le reprenons à partir de ce graphe de Lacan. Il nous a marqué, enfin vous le connaissez (Solange Faladé dessine le graphe au tableau), le petit a, le bébé infans avec le cri assignifiant ; cette matrice de l’idéal du moi. Alors reprenons ce graphe. Le discours commun c’est en fait la langue qui préexiste à ce bébé qui va un jour choir et c’est ce que dans la remarque au rapport de Daniel Lagache, il a appelé ce – ça parle de lui -. Alors, ce – ça parle de lui - mérite qu’on s’y arrête un instant. Ça parle de lui, naturellement ça vient de ceux qui ont l’usage de la langue avant que l’enfant ne soit, ne naisse et même ne soit conçu, et nous en avons beaucoup d’exemples. Je vous ai parlé souvent de – le fils du parisien libéré -, il n’y a pas de doute que avant même qu’il ne soit conçu il était déjà question de lui puisque des dispositions avaient été prises au cas où il viendrait à s’avancer. Il y avait là entre celui qui peut-être un jour deviendra géniteur et la mère, il y avait là déjà, marchandage n’est pas le bon mot, mais quelque chose de cet ordre qui entourait la venue éventuelle de cet enfant.

Pour prendre d’autres exemples que celui du parisien libéré, prenons le cas de ces enfants qui naissent par insémination : Il n’y a pas de doute qu’il est parlé de lui avant qu’il ne soit, qu’il est parlé de lui – viendra-t-il un jour, ou ne viendra-t-il pas ? - mais il est déjà là dans le discours de l’Autre. Il est déjà là, et là aussi quand on a à (recevoir ?) les futurs parents, on voit bien que ce qui se dit entre ces parents et cet enfant qui viendra, ce qui se dit concernant sa conception éventuelle, a déjà une importance grande pour l’avenir de celui-là même qui va venir.

Les S1 du – ça parle de lui – employés, donc portés sur la ligne, donnent sens au $, c’est le sens du -ça parle de lui – qui s’écrit sur la ligne, le sens de ce que veut dire ce qui est parlé de lui avant sa naissance)

Alors, ce qui se dit au champ de l’Autre, ce – ça parle de lui avant qu’il ne soit – c’est bien à ce – ça parle de lui – que lorsque l’enfant commence à parler, lorsque ce cri assignifiant deviendra parole, c’est à dire véhiculera un signifiant, donc lorsque le sujet va pouvoir émerger de dessous les signifiants qui le couvrent, et qui le couvrent en un lieu transcendant – je vous redis cette phrase de Lacan toujours dans la remarque au rapport de Daniel Lagache - donc, toutes les fois que ce sujet va faire en sorte que du S1, après lui avoir permis d’émerger, que du S1 puisse là venir s’inscrire, c’est bien du discours de l’Autre, de ce qui s’est dit en ce lieu, dans ce champ de l’Autre, c’est bien ces signifiants qui vont venir s’inscrire ici.Et ces signifiants, comme il ne peut pas y avoir de S1 sans S2, ce S2 qui est là, déjà aussi, hors du champ de l’Autre ce S2 va aussi s’inscrire. Et donc, ce qui s’inscrit, à cette ligne supérieure c’est bien ce qui est du discours de l’Autre. Et dans ce premier temps les signifiants qui sont portés sur cette ligne supérieure, disons les choses comme cela, c’est à dire employés par le sujet, ces signifiants vont, dans ce temps, donner sens au sujet. C’est à dire que le sens de ce – ça parle de lui avant qu’il ne soit – c’est bien cela qui va s’inscrire lors des différents appels, lors de cette première partie de l’aliénation, c’est ceci qui s’écrit à cette ligne supérieure. C’est le discours de l’Autre. On peut comprendre que ce qui là vient de se mettre en place, ces signifiants, ces S1 articulés à S2, on peut comprendre ce que Lacan dit, lorsqu’il nous dit que le discours de l’inconscient, c’est le discours de l’Autre. L’inconscient, ce sont toutes ces pensées, tous ces signifiants, qui viennent de ce qui était parlé, de ce qui faisait le discours de l’Autre concernant ce bébé qui va naitre. Donc le sujet dans ce premier temps, le sujet prends du sens, prend le sens de ce que veut dire ce qui est parlé de lui avant sa naissance.

Mais dans ce mouvement qui se met en place, pour que ce S2 puisse s’écrire, il faut que le sujet rencontre le désir de l’Autre, rencontre ce point de manque de l’Autre. Et donc il est aussi intéressé par ce désir de l’Autre.

Et pour que ce S2 puisse venir s’inscrire, s’écrire, le sujet fait donc appel à l’Autre, appréhende ce manque de l’Autre. Et dans ce deuxième mouvement quelque chose se passe qui est le sujet, ce sujet barré, aliéné au premier signifiant, au signifiant unaire – dit Lacan, dans ce séminaire sur la subjectivation – ce signifiant va perdre une partie de son sens, sens qu’il a pu saisir avec les premiers signifiants, les signifiants unaires articulés à ce qui est ce S2 qui va s’écrire.

Il perd une partie de son sens et il va être divisé par le deuxième signifiant.

Et cette division sera accompagnée de l’aphanisis, de ce que Lacan a appelé le fading du sujet. C’est à dire que le sujet disparaît.

Et c’est au cours de cette disparition que va se produire ce deuxième temps que Lacan a appelé la séparation. Il nous dit que ceci ne peut pas se faire sans torsion. Il le dit à différentes reprises dans cet article.

Alors pour nous l’illustrer il prend deux opérations. Je dois dire que ces deux opérations qu’il a apporté en 64, dont il va reparler, surtout pour ce qui est de l’aliénation, en 66-67, ces deux opérations, il n’en reparlera plus. Ça ne veut pas dire que parce qu’il n’en reparle plus que ça n’a pas un intérêt. Ces deux opérations, c’est l’opération de l’aliénation et de la séparation. Mais il fait pour l’aliénation ces deux cercles. (Solange Faladé dessine au tableau). Ici il met – l’être – entre parenthèses – le sujet, ici – le sens- entre parenthèses – l’Autre -.

Alors pour ce qui est de l’aliénation, l’opération c’est la réunion. Il y a cette opération de la réunion et la réunion nous dit-il, il s’excuse d’avoir à le dire, ce n’est pas une addition. S’il y a cinq éléments d’un coté, cinq éléments de l’autre et que entre les deux se trouvent des éléments communs, la réunion fera que il n’y aura plus que huit éléments, on ne comptera pas deux fois les éléments qui sont communs aux deux cercles.

Et nous dit-il si le sujet choisit le coté du sens, c’est à dire ce coté de l’Autre où il y aura un sens apporté à ces signifiants qui viennent du grand Autre, alors il aura le sens mais écorné de toute cette partie. Choisissant le sens, le sens ne peut être qu’écorné. Il donne comme exemple – la bourse ou la vie- si on veut avoir la bourse, on a beaucoup plus de chance de perdre la vie. Il arrive très rarement de pouvoir conserver et la bourse et la vie si au détour d’un chemin on vous dit « la bourse ou la vie », vous avez intérêt, si vous voulez avoir la vie, intérêt à remettre votre bourse, si bien que ce qui était entre les deux cercles, on aura cette vie, mais de toute façon, il faut bien se dire qu’on va perdre la bourse.

Donc le sujet qui choisit le sens, c’est à dire celui qui parle, ce sujet ne peut avoir le sens (qu’) écorné de l’être. Mais, tout à l’heure, lorsque je vous ai parlé de ce sujet qui vient d’émerger et qui dans un premier temps a le sens, pour pouvoir être sujet de l’inconscient du fait de sa rencontre avec le désir de l’Autre, il va perdre une partie du sens. Et le sujet sera toujours entre le sens et le non-sens que Lacan met ici. Pour être sujet de l’inconscient, on ne peut l’être qu’en perdant une partie du sens. Sens et non sens vont de pair. Ça n’est peut-être pas bien fait mais ça respecte je crois ce que Lacan a produit dans son séminaire.

Donc ce sens et ce non sens vont toujours de pair pour le sujet de l’inconscient puisque nous avons vu qu’il y avait nécessité pour qu’il y ait aliénation, il y avait nécessité qu’il y ait au moment de ce qui fait l’aliénation, nécessité de la perte d’une partie du sens. Et vous savez plus tard, toute l’importance que Lacan va donner à ce non sens, dans la suite de son enseignement, pour ce qui est de ce sujet de l’inconscient.

Mais ce deuxième temps de l’aliénation, va mettre en mouvement la deuxième opération : la séparation. Cette deuxième opération Lacan nous dit que c’est l’intersection. (Solange Faladé dessine au tableau)

Donc nous avons toujours deux cercles qui se recoupent, mais ici il n’y a que cette partie qui nous intéresse. Et c’est dans ce mouvement – alors c’est là que j’ai eu du mal à bien saisir ce qu’il nous dit – il y a ici une lunule qui est donc, mettons, du coté du sens, et (ici) du coté de l’être. Cette lunule va être recouvert par ce qui est de l’intersection, puisque cette intersection intéresse aussi le manque du sujet. Et c’est ceci qui va venir ici recouvrir cette lunule. C’est dans ce mouvement à la fois circulaire nous dit Lacan que la torsion va se faire. Je reviendrai une autre fois sur cette intersection puisque l’intersection aura une partie de l’un et de l’autre, mais en même temps ce ne sera ni à l’un ni à l’autre. C’est à dire que c’est cet objet petit a qui va choir, cet objet qui va jouer sa partie seul, sans s’occuper du - tout -, nous dit-il dans son article position de l’inconscient. C’est ceci qui va venir remplir cette lunule. C’est à dire que ce manque qui est du coté du sujet, ce manque va venir recouvrir ce qui est le manque de l’Autre, ce que le sujet dans son deuxième temps, dans la deuxième partie, c’est à dire la séparation, ce qui fait que le sujet va être et aliéné, et limité. Cette partie, va, nous dit Lacan ni être au sujet ni être à l’Autre. C’est ce petit a qui joue sa partie seul, qui n’est plus ni au sujet ni à l’Autre.

Il insiste, parce que cette torsion il en parle à différents moments de son article. Il commence par nous dire, tout ce qui va se passer dépend de la structure du signifiant, que d’abord il s’est occupé de ce qui est de la coupure qui est le signifiant. Il insiste bien sur le fait que ces signifiants sont scandés, enfin, l’un ne peut pas être l’autre. Donc cette coupure qu’est le signifiant, il nous dit que c’est à structure de bord. Et c’est essentiellement autour de cette structure de bord qu’il met en place les deux opérations de la réunion et de l’intersection.

Ensuite cette structure de bord – dans ce qu’il nous dit dans ce chapitre - a avoir avec ce que nous avions longuement étudié, c’est la pulsion et ce qui borde les orifices où la pulsion sera intéressée, et ce qui est aux confins – si je puis dire - de ces orifices, ces différents objets petits a. Donc c’est de cette structure de bord, de ce qui intéresse la pulsion, de ce qui intéresse la libido, c’est essentiellement de cela qu’il nous parle. Et si vous vous souvenez, cette pulsion avait aussi dans son trajet, dans son parcours, cette torsion. Plus tard, Lacan nous dira que c’est parce que le sujet est intéressé que le sujet a une structure Moebienne, mais ici là où il en est dans son enseignement, et les éléments qu’il a à sa portée pour nous expliquer ce qu’il essaie de faire autour de l’émergence du sujet, de son rapport avec la pulsion, c’est avec ces deux opérations logiques qu’il essaie d’avancer et de nous rendre la chose compréhensible.

Dans ce passage des 4 concepts, il nous parle, à propos de ce manque, de ce manque du sujet et de son rapport au manque de l’Autre, il nous parle d’un manque initial. Et ce qu’il nous dit autour de ce manque initial, a avoir avec la reproduction de l’être parlant, du fait qu’il parle et qu’il est sexué. Alors, ceci, je l’ai relu avec plaisir, puisqu’en fait c’est une façon de nous parler de ce – il n’y a pas de rapport sexuel-. Il ne le dit pas encore à ce moment là, mais c’est ce dont il est question puisque, nous dit-il, l’être parlant lui, il ne sait pas qu’il n’y a pas au niveau de son inconscient, de tous ces signifiants qui l’aliènent, il n’y a rien qui lui disent comment se conjuguent l’homme et la femme, rien ne vient au niveau de l’inconscient lui dire comment homme et femme doivent se comporter et ceci contrairement à ce qui se passe chez les animaux. Donc il n’y a rien qui permette à l’homme et à la femme d’en savoir quelque chose et essentiellement, nous dit-il, parce que s’il y a activité et passivité au niveau de l’inconscient, s’il y a quelque chose de l’homme au niveau de l’inconscient, il n’y a rien de la femme.

Donc au niveau de l’inconscient aucun signifiant ne permet à l’homme et à une femme de savoir comment se comporter. Et il nous parle de Daphnis et Chloé, il nous dit que dans tout ce qui a pu s’en dire, (ou) s’en approcher, il y a toujours une vielle femme qui est chargée d’apprendre à ses plus jeunes comment se comporter.

Lorsque j’avais eu à parler une deuxième fois aux journées de Baudeloque, c’était autour du désir des femmes avancées en âge et qui désiraient un enfant, dans ce que j’ai été amenée à dire en commençant, j’ai du parler de ce – il n’y a pas de rapport sexuel -. L’illustration que j’en ai donnée c’était ce qui se passe dans la basse-cour, et que beaucoup ont pu observer. Le coquelet devenu coq, sait à l’instant même, comment se comporter, dès qu’une poule passe à sa portée, passe prés de lui. Il n’a besoin de personne, ni d’une vielle poule âgée, ni du coq pour lui dire ce qu’il a à faire.

Donc, ce savoir sur le sexe, ce savoir instinctuel de l’animal sur le sexe et comment se comporter et bien nous ne l’avons pas. C’est : il n’y a pas de rapport sexuel. C’est en fait cela, et c’est ceci dans ce qu’il nous dit dans cette leçon, ce – il n’y a pas de rapport sexuel. Mais il ne le dit pas encore, il n’a pas encore formulé – il n’y a pas de rapport sexuel inscriptible dans la structure – puisqu’il n’y a rien du signifiant qui vient là au niveau de l’inconscient faire savoir comment homme et femme doivent sur ce plan se comporter. Je le dis en passant, ce problème nous intéresse actuellement à cause de ce que nous avons à dire sur le fantasme.

Donc pour pouvoir nous faire comprendre ce qu’il en est de ce manque, ce que le sujet avec son manque et son manque vient de ce qu’il est aliéné par le signifiant et que de ce fait il va perdre une partie de son sens. Ce manque va faire que lui même sera au contact du manque de l’Autre. Mais c’est cet objet qui va être produit lors de la séparation. Et vous vous souvenez que je vous avais dit que ce deuxième signifiant qui n’est pas dans le corps du grand Autre, le sujet le prend ailleurs et va se produire cette opération deuxième, cette intersection qui va faire que une partie de ce qui aura été prélevé sera cet objet petit a, et c’est cet objet qui va venir être dans cette partie du manque de l’Autre et qui va ainsi faire que les deux manques peuvent se recouvrir.

Je crois qu’il faut reprendre, parce qu’il insiste sur cette torsion. C’est à la fois circulaire et il y a cette torsion. Je pense que plus tard dans son enseignement il se serait servi de la structure Moebienne, avec ce qu’elle est : monture pour le petit a. Mais enfin, pour le moment il ne le dit pas encore. Il le dira en 65. Pour le moment il se sert de ces deux opérations permettant d’introduire à cette problématique : ce qu’est et comment le sujet vient à naitre. Il se sert de ces deux opérations. Et je crois aussi que ça a été sa façon de nous introduire à la logique, ce que jusque là il n’avait pas encore fait, en tout cas pas d’une façon aussi nette, que dans ce séminaire de 64 et dans ce qu’il en dit en même temps dans la position de l’inconscient. Et à propos de cette position de l’inconscient, il nous dit que c’est ce qui lui en reste de Bonneval. Et je pense que tout ceci est autour de Bonneval puisque là toujours dans ce fameux chapitre (1) et celui qui suit, il nous parle de cet Vorstellungsrepräsentanz et là il reprend toute la discussion qu’il a eu avec le congrès de Bonneval et certains de ses élèves qui l’ont quitté et qui lui ont reproché sa traduction. Mais enfin, ce que j’en avais retenu pour vous l’année dernière, c’était qu’il faisait de cet Vorstellungsrepräsentanz, le S2, ce qui permet le frayage, et tous les autres refoulements, et donc leur passage dans l’inconscient. Ceci je m’y suis arrêtée très longuement l’année dernière. Je n’y reviens pas. Ce que je voulais dire et que j’ai pensé, que peut-être la solution et la réponse la plus adéquate à la question qui était posée, c’était de revenir au séminaire lui-même, de revenir à ce que Lacan nous dit et d’essayer de saisir pourquoi il se sert de ces deux opérations la réunion et l’intersection, pour nous faire comprendre ce qui se passe lorsque du sujet émerge.

Il y avait aussi ce que je voulais vous dire, lors de ces passages de S1 du corps de l’Autre pour que du sujet puisse émerger. Il y avait un point, et Triol a commencé à l’aborder lors de notre rencontre du premier samedi, ce passage du Réel au signifiant, au Symbolique - il y a du signifiant dans le Réel et Lacan dit quelque part que s’il n’y avait pas de signifiant dans le Réel il ne pourrait pas y avoir du sujet et du sujet de l’inconscient - le passage de ces signifiants dans le Réel aux signifiants lors de la symbolisation, dans la chaine symbolique, ce qui est important, c’est de savoir que ce Réel nous suit. Et au début de son enseignement Lacan parlait d’un Réel (humain) d’un Réel qui est le Réel symbolique, et bien plus tard dans L’Etourdit, toujours à cause de ce Réel il nous dira que le sujet de l’inconscient, ce sujet barré est un bout de Réel. Et je pense que avec ce sujet barré bout de Réel, peut-être que ce qui nous arrête autour du psychotique, peut-être nous pourrions le reprendre en ayant ceci à l’esprit que le Réel nous suit toujours. D’ailleurs il le dit : dès le départ il y a ces trois registres Réel Symbolique, Imaginaire, que du fait de la diachronie - et il y a insisté quelque part, c’est ce que Triol a commencé à expliquer -, il y aura passage du Réel au Symbolique. Mais ceci ne se fera pas en une seule fois. Il y a ce va et viens du Réel à ce qui va être la chaine signifiante symbolisée qui fait l’inconscient. Mais ceci au niveau du Réel ne pourra pas être symbolisé, c’est ce – pas de rapport sexuel -. Il n’y aura jamais aucun sens. Et cette circulation et cette torsion dont nous parle Lacan d’où choit l’objet petit a, et qui sera en relation avec le sujet barré, en fait c’est ce qui vient masquer ce point du Réel qui fait que grâce au fantasme, et du fait de la castration, ce point là sera un point dont le sens ne pourra pas être traduit dans la chaine signifiante mais que grâce au travail de l’analyse on pourra saisir qu’il y a là un impossible que cet impossible a avoir avec la castration et que c’est là comme le rappelait Triol, un point de vérité, un point de vérité qui – et c’est pour ça qu’il est point de vérité - quelque chose se parle :- je ne suis pas battu par mon père -, ou – je suis battu par mon père -, le – je suis battu par mon père – ne pourra jamais se dire puisque c’est en fait ça qui a avoir avec la castration, avec cet impossible, avec ce qui de cette vérité restera toujours un point de Réel.

Je ne sais pas si ça a aidé à comprendre ce qu’il en est de cette torsion. Il m’a semblé que de sauter immédiatement sur la structure du bord de la bande de Moebius que de revenir sur cette aliénation et la séparation d’ailleurs je crois que nous ne l’avions pas vraiment fait l’année dernière et en le relisant en fonction de ce que Lacan nous explique, il explique bien. Peut-être ce qui est de cette torsion peut être saisit puisque cette partie écornée va, lors de cette deuxième opération, ce qui en résulte de cette deuxième opération, viendra combler cette lunule, qui a avoir avec ce qui va manquer au champ de l’Autre.

Ce que je viens de dire c’est en partie dans les 4 concepts, mais dans position de l’inconscient vous avez des passages où Lacan parle de ces deux opérations. C’est les séminaires du 27 mai et du 03 juin 54.

C’est ce qui a avoir avec – pas de ceci sans cela – pas de S1 sans S2 – et entre ces S1 et S2 le désir va être saisit et avec ce désir l’objet métonymique.

L’aliénation qui est la notre, celui qui nous intéresse, ce vel aliénant c’est toujours – pas de ceci sans cela- pas de S1 sans S2 -. C’est ce qui marque le sujet de l’inconscient. Mais qu’en est-il chez le psychotique puisque bien qu’étant dans le langage on ne peut pas dire que - pas de S2 sans S1 - pour ce qui est de la chaine signifiante, (de ce) qui a avoir avec le discours de l’Autre, ce S2 est bien quelque part, puisque le psychotique se présente comme celui qui sait, qui sait parce qu’en un autre lieu on sait.

Enfin, ce soir je ne commencerai pas ce problème du savoir et de la vérité et de la béance maintenue chez le sujet de l’inconscient, maintenue par cet objet petit a.


(1) Livre XI chapitre XVI et XVII