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Gérald RACADOT (1947-2022)

Hommage à Gérald Racadot
Gérald Racadot vient de s’éteindre à la suite d’une longue et pénible maladie contre laquelle il a lutté tant que les traitements donnaient des résultats. Tranquillement, en observateur averti, il faisait le constat de l’avancée de la maladie et de ses effets sur son organisme et m’en faisait part. Jusque ces tous derniers temps, il suscitait des avancées cliniques et théoriques dans le cadre du Cardo du 3ème samedi à partir du commentaire du Séminaire de Lacan à l’étude : actuellement « Problèmes cruciaux pour la psychanalyse ». Récemment, il avait souligné un point fondamental qui, jusqu’alors, n’avait pas été mis à l’étude dans notre École, celui de l’attente de l’analyste dans son rapport à la Chose. Séminaire après Séminaire, il nous mettait sur la brèche et soulignait l’essentiel de ce qu’il découvrait dans le texte, assumant souvent la position de + 1, telle qu’il l’avait théorisée à partir de sa réflexion sur la troisième identification dans les cartels.
Depuis des années, il animait le Cardo du troisième samedi et nous faisait bénéficier ensuite de la réflexion menée dans ce cadre. Il a fait en sorte que l’École Freudienne ne se contente pas de répéter mais interroge aussi l’enseignement de Freud, Lacan et Faladé par petites touches pour mieux en faire surgir leurs significations implicites, ouvrant ainsi de nouveaux horizons de travail.
Nous nous sommes connus avant la création de l’École, tous deux analysants de Solange Faladé, nous nous rencontrions dans sa salle d’attente sans trop oser nous parler puis avec la mise en place des enseignements de l’École Freudienne en 1983, Solange Faladé nous a demandé d’animer avec quelques autres les Enseignements du troisième samedi, ce qui a permis de faire connaissance et de nous apprécier…Ce travail en commun ne s’est jamais démenti, récemment encore, nous échangions à propos de ‘L’homme Moïse et la religion monothéiste » de Freud. Gérald a eu le courage d’être présent et de participer au Cardo ainsi qu’au Séminaire du samedi 15 octobre malgré son essoufflement et sa grande difficulté à se déplacer. Il me faisait savoir le samedi 29 octobre que son état de santé ne le lui permettrait pas d’être présent le 3ème samedi de novembre.
Toujours vigilant, il ne transigeait pas et n’acceptait pas la moindre dérive, la moindre concession à l’air du temps portant atteinte à la rigueur du discours psychanalytique. Il a été un guide, un soutien et un compagnon de route qui a marqué, je lui en suis infiniment reconnaissant.

Le 9 novembre 2022
Robert Samacher


Gérald Racadot m’a accompagnée depuis de très longues années avec humanité, patience, et compétence. Les remarques personnelles qu’il a eu l’occasion de me faire, depuis les débuts de notre rencontre et de notre participation à la vie de l’Ecole, étaient toujours précieuses, touchant au plus juste et sans concession. Primait toujours son souci de transmission, sa fidélité à la théorisation qu’on lui avait transmise, qui ont nourri tout au long de sa vie les nombreux apports personnels qu’il nous a généreusement transmis. C’était, au-delà de toute amitié, un véritable lien, animé par un souci commun d’engagement pour la vie de la psychanalyse. Ses critiques, rares mais efficaces car il y avait toujours quelque chose à glaner, étaient encouragement à approfondissement, et c’est bien-là l’aspect essentiellement pédagogique de ses interventions.
Il partait toujours de ses observations cliniques et construisait sa théorisation en conséquence. Inestimable travail dont nous ne faisons que soupçonner la richesse.
Son courage et sa fidélité à l’Ecole Freudienne jusqu’à la fin de sa vie font mon admiration
Mon adieu est infiniment triste. Merci Gérald, j’ai eu beaucoup de chance de vous connaître.

Annie Biton


Hommage à Gérald RACADOT,

Il n’est pas facile de dire Adieu à Monsieur Gérald Racadot. Il aurait bien voulu rester un peu plus longtemps avec nous et nous avec lui mais la maladie en a décidé malheureusement autrement. Il est parti, comme il l’a voulu, paisiblement entouré de sa famille avec sa chère épouse et ses chers enfants. Il a pu dire plusieurs fois avant de nous quitter qu’il avait été content de sa vie, ce qui ne peut se dire « qu’à la fin » avait-il ajouté en souriant.
Il a pu réaliser son désir pour la psychanalyse et le partager avec nous jusqu’au bout.
Il est parti, pas sans nous dire un mot, au contraire. Des mots, il nous en a dits et écrits de nombreux, des mots qui avaient tout leur poids de justesse et de vérité. Il nous a légué un précieux héritage que chacun pourra continuer de faire vivre à sa manière.

Nous avons tous eu la chance de le rencontrer au sein de l’École Freudienne et de profiter de son travail, de sa rigueur articulée à son fort désir sans jamais aucune complaisance, ce qui pouvait d’ailleurs nous bousculer parfois. En même temps, il prenait toujours soin de nous accompagner, sans jugement, à formuler nos idées, nos réflexions, notre question. Toute question, quelle qu’elle soit et venant de qui que ce soit, avait sa place. Il savait se mettre à la portée de l’autre et interpeller le sujet en nous, parfois caché, pour encourager à faire des avancées sur la voie du désir d’en savoir plus. Il avait à cœur d’être dans l’éthique du bien dire, dans l’exigence du dire juste. Il a su nous enseigner vigoureusement ce qui était de l’ordre de la psychanalyse et ce qui ne l’était pas.

Il se rendait disponible pour nous éclairer sur un point obscur de l’enseignement de Freud, Lacan ou Faladé. Quand on lui proposait de relire nos textes pour un exposé, il le faisait avec une grande attention et un respect du temps du cheminement de notre pensée. Il savait entendre et soulever ce qui était au seuil de ce qui cherchait à être dit et/ou à être écrit, ce qui permettait alors de le faire advenir à sa formulation.
C’était un homme de la clinique, de terrain. Ce qu’il pouvait nous transmettre lui venait autant de son travail honnête et rigoureux des textes que de l’écoute de celles et ceux qui lui parlaient. Il avait l’oreille alerte et la répartie vive. Il entendait la souffrance, la détresse de celui qui venait lui parler. Dans son silence, il y avait cette écoute, cette présence si particulière en lui, humaine qui fait que malgré que vous soyez seul(e), il y a quelqu’un qui est là et qui conduit le travail de l’analyse. Bien que pouvant être touché par des moments de désarroi, de naufrage que ses analysants ont pu traverser et lui confier, il restait analyste. Il a toujours tenu la barre de son désir d’analyste pour la conduite de la cure et ce jusqu’à son terme ; ce qui fut très enseignant en soi, le meilleur des enseignements. Le désir c’est ce qui tient, « c’est efficace », disait-il de manière très affirmée et répétée, il ne manquait pas d’exemple pour en témoigner. C’est par cette voie que la transmission opère et a opéré. Il le savait bien. Il a été généreux avec nous en nous transmettant ce qu’il avait appris de la psychanalyse et donc aussi de la vie. Il y était bien planté. C’est ce qui lui donnait autant de présence, de charisme, de solidité et qui faisait que ses paroles comptaient et étaient d’une grande valeur, nous aidant toujours à nous repérer, retrouver la lumière dans l’obscurité, retrouver la justesse, la voie de la bonne issue.

Il va nous manquer au sein de l’École car c’était pour nous une boussole. Il nous donnait souvent nos « points cardinaux », pour reprendre le titre qu’il avait donné à l’un de ses textes.
Il va me manquer à l’École et dans ma vie.
Les êtres chers partent toujours un jour, ainsi va la vie… mais ce qu’il nous a légué à chacun restera bien inscrit en nous tel un bon trésor.
Ma rencontre avec lui, comme pour d’autres parmi nous, a été une véritable chance et une véritable richesse, richesse précieuse qui va continuer de nous accompagner et nous guider autant dans la poursuite de notre travail que dans celle de nos existences.
C’est pourquoi je ne pouvais vous dire Adieu sans vous rendre hommage et vous dire « O combien Merci » Monsieur Gérald Racadot.

Isabelle Garniron,
Le 06 novembre 2022.


Gérald RACADOT s’est avancé dans la nuit avec lucidité et élégance. Cela restera pour moi le reflet de son désir d’analyste et pour la transmission de la psychanalyse. Je garde le souvenir de son style singulier, engagé jusque dans son être et marqué par son tranchant sans complaisance, son éthique du bien dire, mais également sa bienveillance, ses traits d’esprit, son souci pour les personnes qu’il accompagnait, témoignages de son amour de la vie, témoignages aussi qu’il était allé loin, comme peu l’ont fait, dans la réalisation de son être. Sa disparition nous laisse devant un vide immense tant la force de son désir nous portait. Mais son engagement a aussi tracé la voie de ce qui peut continuer à nous soutenir dans l’existence.

Pierrick Brient
9 novembre 2022


Pour Gérald
Gérald nous a quittés trop tôt dans sa vie. Il savait depuis des années que ses jours étaient comptés. Il était médecin, et il regardait toujours les choses en face. C’était un psychanalyste de grand savoir, et ce savoir, il nous l’a fait partager avec sa grande générosité et sa grande rigueur intellectuelle jusqu’au bout, jusqu’à ce samedi où nous tous, à l’École freudienne, nous avons eu le cœur serré à le voir si atteint par la maladie. Hélas, le samedi d’après, il n’était plus de ce monde, et nous étions nombreux, à cette messe si émouvante, pour l’accompagner et pour accompagner sa famille. Il était, comme moi, de fondation à l’École, et c’est lui qui m’a proposé, en 1991, de former un cartel sur les mathématiques de Lacan. Ce cartel se réunissait à la maison le vendredi soir une fois par mois, et nous avons si bien fait circuler la parole, entraînés par son désir de travail, qu’il a écrit un article intitulé « L’identification dans les cartels » dans le Bulletin n° 57 en 1997. Le Bulletin de l’École fait d’ailleurs état de ses très nombreuses contributions, toujours riches de son savoir, savoir qui répondait librement aux questions de cardo, le samedi matin, et ses réponses étaient toujours passionnantes.
Pendant plusieurs années, je suis allée à Vesoul tous les lundis, pour une analyse qu’il a arrêtée quand lui-même a décidé d’arrêter son activité. Il m’avait appris en riant qu’un de ses patients lui avait dit : « Mais qu’allez-vous faire sans nous ? » La présence de Gérald manque déjà à nous tous. Qu’allons-nous faire sans lui ?
Michèle Aquien
12-XI-22